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Moutier

Les nerfs de la guerre

A une semaine des élections, Le JdJ a été reçu à l’Hôtel-de-ville pour cuisiner les deux candidats à la mairie, le sortant, Marcel Winistoerfer, et Patrick Tobler. Notamment sur l’état des finances.

Patrick Tobler (UDC) ou Marcel Winistoerfer (PDC)? Réponse le 25 novembre... si l'élection est maintenue. Photo Stéphane Gerber

Michael Bassin et Dan Steiner

En théorie, il reste aux Prévôtois, avec aujourd’hui, neuf jours pour élire leurs autorités pour la période 2019-2022. Ça, c’est en faisant fi du recours déposé cette semaine par un groupe de citoyens, qui exige le report des élections du dimanche 25. Toujours est-il que LeJdJ s’est entretenu avec le maire PDC sortant, Marcel Winistoerfer, et son unique contradicteur, le président de l’UDC locale et de celle du Jura bernois, Patrick Tobler. Et en ces temps troublés, il a bien entendu été (aussi) question de l’avenir institutionnel de la Ville.

 

Après trois recours tranchés ou déposés en douze jours, dans quel état d’esprit êtes-vous?

MW: Il n’y a pas grand-chose à en dire, à part en prendre acte. Cela ralentit toujours l’histoire de Moutier.C’est comme si on poursuivait le but de déplacer les choses. On verra si l’on est là pour rien ou si les élections ont lieu... On verra bien.

PT:La vie continue. Ce matin, il a fallu aller bosser. Ça reste encore le plus important dans une vie. Mais, voilà, les recours sont un droit et les citoyens ont utilisé cette voie-là pour les faire valoir. Nous verrons si la justice leur donne raison ou non. Tout ce qui a été fait ou dit a été communiqué. Il n’y a aucun levier pour pousser d’un côté ou de l’autre.

Cela doit tout de même être prenant pour vous. Parvenez-vous encore à parler d’autre chose avec vos amis, votre entourage?

MW:A l’école, je n’en parle pas du tout. Ce qui n’est pas plus mal. A la maison, évidemment, on lit sans arrêt des nouvelles dures. Il est vrai que je n’ai pas l’habitude de lire des attaques personnelles telles que celles de ces derniers jours. Quand j’ouvre un journal, je suis le con un peu partout! J’ai 61ans, mais je n’ai pas eu cette habitude. Je dors quand même, même si je me réveille un peu plus tôt. (Rires.) Mais c’est surprenant, je n’aurais jamais pensé en arriver là... Mais je suis un bon «Staubirn» (ndlr: il possède des origines soleuroises) et, s’il le faut, je sais aussi jouer au taureau!

PT: C’est clair que, à Moutier, cela fait deux ans qu’on en cause sans arrêt, c’est un fait. Après, au travail, on en parle un peu comme le match de foot ou de hockey de la veille. ‹Qu’avez-vous refait, les Moutier?› Et puis ça s’estompe vite. Comme les collègues (ndlr:il est employé chez Tornos) viennent d’Ajoie, de Tavannes ou de France, cela leur passe au-dessus de la tête. D’autant que l’économie actuelle ne permet pas d’en discuter pendant des heures. On en a, parfois, un peu marre quand on sort et qu’on nous interpelle. C’est aussi pourquoi je me suis distancé des réseaux sociaux ces temps, où des personnes sont très virulentes.

Patrick Tobler, êtes-vous en accord avec le recours demandant le report des élections?

La justice et moi ne sommes pas copains... Je pense que des limites à ne pas dépasser l’ont été. Et il est important de dire que nous ne sommes pas d’accord de la manière dont cela ça se passe.

Et si la décision du report était prise, Marcel Winistoerfer, seriez-vous prêt à voter coûte que coûte?

Le vote n’aurait pas de valeur, donc je ne vois pas l’intérêt.

Donc vous ne le recommanderiez pas?

MW: Bon, je pense qu’il faut voter. C’est ce qui va d’ailleurs certainement arriver car je ne vois pas l’élection être repoussée. Voter et attendre une décision, par contre, me semble déjà plus logique. Je ne sais même pas qui va trancher ce dossier lourd de sens. Après, ce qui est abordé, je ne pense pas être allé trop loin. La commune n’avait rien à voir dans l’organisation de la fête (ndlr:la marche organisée vendredi 9 par Moutier – ville jurassienne).

PT:Pour organiser ce qui l’a été en quatre jours, il faut que cela aille vite. Notamment pour bloquer une route principale et suspendre un drapeau à un Hôtel de ville...

La Municipalité a fait recours contre la décision de la préfète. Sera-t-il maintenu selon le résultat des élections?

MW: C’est une bonne question... (Il réfléchit.)Je pense que oui. Au contraire, si nous devions réaliser un bon score, cela permettrait d’être plus présent et précis dans nos demandes vis-à-vis du canton. Mais également envers la décision de la préfète. On pourrait dire:‹Voyez, le peuple, une fois de plus, réclame que Moutier devienne jurassienne. On est confiants, même si l’on est face au plus grand appareil politique de la région (l’UDC, ndlr). Ce sera compliqué, mais avec un bon résultat, idéalement les fameux 60%, nous aurons des cartes en main.

Est-ce que les Prévôtois iront voter cette semaine et dimanche?

MW:Le taux de participation est déjà exceptionnel à chaque fois.Quand, à Bienne, ils atteignent 35%, ils sont contents! Quand ce n’est pas haut, ici, c’est 58%. Là, ce sera plus haut, évidemment. Ce qui n’est pas très sain, d’ailleurs, cela ne correspondant pas à l’intérêt réel des gens pour la chose publique... C’est Moutier, quoi.

PT:Une influence, cela aura, c’est sûr. Déjà médiatiquement: pour une élection à la mairie, avez-vous déjà été dans le SonntagsBlick?

 

Marcel Winistoerfer, comment jugez-vous votre bilan à la mairie depuis l’été 2016?

Nous avons avancé sur passablement de dossiers comme les Laives, avec la création de places de travail à la clé; l’action de la Municipalité en faveur des employés de la Verrerie; l’infirmière et la travailleuse sociale en milieu scolaire. Le projet de l’école ménagère a, par contre, été bloqué et, désormais, nous sommes dans l’attente de la concrétisation de Moulindustrie.

Patrick Tobler, quel regard portez-vous sur le bilan du maire actuel?

Plutôt mitigé. De bonnes choses ont certes été entreprises, mais l’état des finances n’est pas bon. Et je ne vois pas comment cela irait mieux juste en changeant de canton comme certains l’affirment.

Quels seront vos trois projets prioritaires si vous êtes élu à la mairie?

PT: Nous avons de bonnes infrastructures en ville, mais il faut mieux les relier car elles sont éloignées les unes des autres. Ensuite, il faut se battre pour pouvoir construire davantage en hauteur. Enfin, il faut maintenir l’état de nos infrastructures sans créer de nouveaux projets impayables.

MW: Je souhaite concrétiser l’école ménagère, redonner vie au secteur de la gare et poursuivre le développement aux Laives. Et puis j’ai un rêve: implanter une halte CFF à l’entrée de Moutier (ndlr: côté Court).

Comment assainir les finances?

MW: Toucher aux prestations est très compliqué, car cela a des incidences sur l’attractivité de la ville. Et celle-ci est primordiale pour garder voire faire venir des habitants. Des mesures sont donc inévitables, mais réfléchissons bien. Et puis une réflexion est nécessaire à chaque départ à un poste communal.

PT: Veillons déjà à la tenue de certains projets. Pour la piscine, par exemple, je pense qu’il y aura probablement un dépassement de crédit. Et concernant l’école ménagère, je trouve incompréhensible de vendre un bâtiment sans savoir ce qu’on va faire ensuite.

Malgré la situation politique, l’Hôpital de Moutier doit assurer sa pérennité. Quelle solution dans l’immédiat?

MW: Lorsque le départ de Moutier sera effectif, l’hôpital sera repris par le Jura. D’ici là, je suppose que les Bernois s’en occuperont. La proposition des tiers (ndlr: les deux cantons et un privé)? Je ne suis pas contre, mais cela compliquerait l’affaire... Lasanté doit rester dans le public.

PT: La médecine est un monde très complexe. Une commune peut uniquement faire confiance au conseil d’administration et à l’exécutif cantonal.

La culture et le sport ont une certaine vitalité à Moutier. Quel soutien leur apporter?

PT: Mieux vaut voir la jeunesse active dans une société qu’à la gare en train de boire des bières. Tout en veillant aux finances, il faut donc continuer de soutenir les sociétés qui contribuent au vivre-ensemble.

MW: Les sociétés sont essentielles, il ne faut pas toucher au soutien actuel.

Qu’est-ce qui joue en votre faveur, et en faveur de votre adversaire?

MW:Mon expérience à l’exécutif municipal et ma volonté de continuer à travailler sur les dossiers et concrétiser le transfert de la ville. Quant à Patrick, il s’investit beaucoup. Je n’ai aucun problème avec lui, sauf sur le dossier institutionnel.

PT:Je représente un vent nouveau, le changement. Marcel est très connu et apprécié par beaucoup, même si cela a peut-être changé ces derniers temps... (Rires)

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