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Saignelégier

Un joli casse-tête à la suite de la faillite de l’usine Miserez

Ce fleuron de l’industrie horlogère a cessé ses activités en 2015

L’usine de boîtes de montres BGM Miserez: les activités ont cessé depuis mai 2015. Gérard Stegmüller
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Gérard Stegmüller

Pertinent, le coup de plume du député vert Ivan Godat. L’élu du Bémont vient d’interpeller le Gouvernement jurassien au sujet de la faillite de l’ancienne usine de boîtes de montres BGM Miserez SA à Saignelégier, dont la liquidation a été prononcée en mars dernier.
«Le passé industriel du site peut laisser penser qu’une pollution des sols n’est pas à exclure», s’inquiète le politicien franc-montagnard.

D’où le titre direct de sa question écrite: «Fermetures d’usines et dépollution: est-ce au contribuable de payer?» Dans le cas qui nous intéresse, la situation semble un brin plus compliquée qu’elle n’y paraît.

Patate chaude

La faillite de la firme a été annoncée en mai 2015. Depuis, son directeur Bernard Miserez a cessé toute activité dans les locaux sis à la rue du Chasseral, dont une partie est louée à des locataires privés, des musiciens, un carrossier. «J’ai payé tout le monde. C’est l’Etat jurassien qui m’a mis en faillite pour plus de 3 millions de francs. Je suis écœuré», lâche-t-il.

L’industriel a fondé BGM Miserez SA en janvier 1989. C’est son grand-papa Albert qui a créé Miserez SA en 1900. Son père Alphonse a ensuite repris le flambeau. Les affaires aidant, une deuxième unité de production est inaugurée à Cornol. En 1988, l’usine ajoulote est attachée à une nouvelle entreprise, Cortech SA.

Le début des ennuis, à en croire Bernard Miserez. «Mon père a vendu Cortech à Tag Heuer. Plus tard, l’Etat jurassien m’a réclamé plus de trois millions de francs pour dépolluer le site de Cornol, histoire de toucher des subventions fédérales. Incroyable, pour une affaire qui remonte à 1972, sous l’Etat de Berne. J’ignore si Tag Heuer a payé les 900000 francs qu’on lui demandait. Mais moi, j’ai été obligé de déposer le bilan. J’ai ramassé la patate chaude. Un gâchis monumental, alors que je planifiais tout un projet sur le site de Saignelégier.»

Du temps de sa splendeur, dans les années 1990, BGMMiserez SA employait plus de 100 collaborateurs. Un véritable fleuron de l’industrie locale.

Le pollueur disparaît

Bernard Miserez estime minime la pollution sur le site du chef-lieu franc-montagnard. «Elle est due à une fosse. Des analyses ont déjà été menées. Le coût de la remise en état tournait autour des 50000 francs.» Depuis, les normes ont changé. L’Office de l’environnement (ENV) confirme les propos d’Ivan Godat: la parcelle de 6231 mètres carrés, située juste derrière la halle du Marché-Concours, est répertoriée au cadastre jurassien des sites pollués comme site nécessitant une investigation.

«Nous recensons quelque 1300 sites pollués sur le territoire cantonal. Ceux qui nécessitent des investigations sont environ 100. La problématique avec les usines de boîtes de montres de l’époque, c’est qu’elles utilisaient fréquemment des produits solvants chlorés. On ne connaît pas l’ampleur du sinistre. Il peut occasionner des frais élevés ou moindres. Les coûts de dépollution se retrouveront à la charge du canton. La Confédération en subventionnera une partie», souligne Christophe Badertscher, collaborateur scientifique à l’ENV.

Refus de la banque

Compte tenu de l’emplacement intéressant de la parcelle, les études seront menées à un rythme soutenu, ajoute Christophe Badertscher. Les résultats sont attendus pour septembre-octobre.

Un dossier complexe. Ce n’est pas le préposé à l’Office des poursuites et faillites du district des Franches-Montagnes qui dit le contraire. Jean-Marie Aubry: «La société a été mise en faillite à la suite d’un surendettement. Pour pouvoir vendre, on doit définir le degré de pollution. La réalisation d’une étude historique et des analyses de prélèvements coûtent 100000 francs.

On ne les avait pas. Nous avons alors demandé une avance de frais à la créancière hypothécaire. Refus de la banque, qui nous a informés que l’immeuble ne l’intéressait plus. Nous avons pu récupérer une cédule. Selon la loi, le bâtiment revient à l’Etat. Mais celui-ci a le droit de le refuser.»

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