Une bonne idée, mais dont le coût dépasserait l’utilité

Philippe Oudot

Selon les statistiques policières, près de 36000 vélos ont été subtilisés en Suisse en 2016. Un chiffre qui se base sur les déclarations de vols, mais qui, en réalité, est sans doute bien plus élevé, constatait le député Philippe Messerli (PEV, Nidau), dans un postulat déposé en juin dernier. Et avec plus de 5700vols déclarés, le canton de Berne n’échappe pas à ce fléau.

Selon le député, «il est aujourd’hui clair qu’outre le phénomène des vols d’usage, des bandes se sont également spécialisées dans le vol de vélos et opèrent dans le canton de Berne.» Ces dernières s’en prennent surtout aux bicyclettes les plus chères – vélos de course, VTTet autres vélos électriques. Elles sévissent non seulement sur les lieux publics, mais n’hésitent pas à entrer par effraction dans les caves ou garages privés pour commettre leurs forfaits. Or, déplorait Philippe Messerli, les voleurs ne risquent pas grand chose, car ils sont rarement pincés.

Des appâts
En 2016, seul 1,7%des vols de vélos ont été élucidés en Suisse. Un taux à peine supérieur (1,8%) dans le canton de Berne. Pourtant, relevait l’élu, s’il est impossible d’empêcher tous les vols, on peut augmenter le taux d’élucidation en plaçant des «vélos appâts» munis de GPSdans des endroits stratégiques. C’est ce qu’a fait la «Foundation for tackling Vehicle Crime», aux Pays-Bas. Elle a en effet placé des vélos équipés d’émetteurs GPS à des endroits où les vols sont nombreux, comme les gares, les écoles ou les centres commerciaux.

Une opération couronnée de succès, soulignait l’auteur du postulat. En 2016, en effet, «les quelque 1470 vélos de ce type qui ont été volés ont conduit à presque 1000 arrestations de voleurs». En plus de ces arrestations, soulignait le député, ce projet a également eu un aspect préventif: «Là où des vélos équipés de GPSont été placés, le nombre de vols a rapidement diminué.» Et d’ajouter que les Pays-Bas ne sont pas les seuls à avoir lancé un tel projet: en 2016, la police lausannoise a également mis en route un projet de ce type.

 Aussi demandait-il au Conseil exécutif d’examiner dans quelle mesure «la Police cantonale pourrait, à titre expérimental, placer à des endroits stratégiques» de tels «vélos appâts».

Priorité à la prévention
Sur le fond, le gouvernement admet que le vol de vélos est une des infractions les plus fréquentes dans les villes. Ce sont des délits qui, au vu des sommes concernées, sont d’ailleurs considérés comme des crimes.

C’est d’ailleurs pour cette raison que la Police cantonale mène des actions de prévention, notamment en tenant des stands et en distribuant des tracts et de la documentation. «Ces démarches ont démontré leur utilité, puisque le nombre de vols relevés a chuté de 6921 en 2010, à 5777 en 2016».

Par ailleurs, le Conseil exécutif indique qu’en 2011, la police cantonale avait déjà examiné la possibilité d’utiliser de tels «vélos appâts». Elle était arrivée à la conclusion que d’un point de vue de sécurité, le recours à un tel système était judicieux. Mais du point de vue juridique, il faudra attendre 2019, année prévue pour l’entrée en vigueur de la nouvelle loi sur le police, qui va ouvrir cette possibilité.

Trop contraignant
Le gouvernement note toutefois que le jeu n’en vaut pas forcément la chandelle. En effet, la surveillance de ces appâts et l’intervention de la police nécessiterait d’importantes ressources en personnel. «Celles-ci ne seraient dès lors plus disponibles pour poursuivre d’autres infractions, éventuellement plus graves. Force est donc de constater que le coût dépasse l’utilité.»

Estimant que les campagnes de sensibilisation régulières de la Police cantonale ont un réel effet de prévention, le gouvernement invite le plénum à adopter et à classer ce postulat.