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Réintroduction

Une douillette surprise pour accueillir Arthur

Retour assisté du balbuzard pêcheur.

Un balbuzard pêcheur emporte dans ses serres robustes une truite qu’il a capturée après un piqué vertigineux. Photo:Pixabay

par Blaise Droz

Se faire appeler Arthur avant de se voir offrir un nid douillet, ce n’est pas donné à tout le monde. Mais pour favoriser le retour du balbuzard pêcheur cent ans après son extermination, rien n’est trop luxueux.
Immigré pas clandestin pour un sou, Arthur a pourtant débuté son séjour helvétique en prison. On s’explique: Arthur est un balbuzard mâle qui a été retiré de son nid en Europe du Nord pour faire partie d’un programme de repeuplement en Suisse. Tous ces jeunes ont été amenés dans un local d’élevage sur le territoire du pénitencier de Bellechasse, endroit calme s’il en est.
Le balbuzard pêcheur est un rapace magnifique qui a la particularité de ne se nourrir que de poissons. Et contrairement au milan noir, il le veut frais son poisson! Du coup, le balbuzard est un pêcheur hors pair!

Intégration
Une fois robustes à souhait, les poussins devenus grands ont été relâchés sous haute surveillance. Ils ont eu le temps de se familiariser avec leur environnement et de le considérer comme étant clairement le leur.
Pour Arthur, l’aventure a débuté en 2018 et, à l’automne, il a fait ce que font tous les balbuzards du monde (cette espèce occupe les cinq continents), il a pris son envol pour un long voyage en direction de l’Afrique du Nord.
Puis, au printemps 2020, après deux années d’exil, il est réapparu sur les rives sud du lac de Bienne, endroit qu’il affectionne visiblement.
A Hagneck, non loin de la centrale au fil de l’eau sur le canal de l’Aar, les ornithologues du projet balbuzard, initié par la société «Nos oiseaux», ont installé une plateforme de nidification bien haut sur un vénérable chêne suffisamment isolé pour que les oiseaux qui l’occuperont disposent d’une vue dégagée dans toutes les directions. Pour cela, il a fallu sacrifier quelques branches trop dominantes de l’arbre hôte.

Le CEPOB dans le coup
Le Centre d’études et de protection des oiseaux de Bienne et environs (CEPOB) n’a pas hésité à racler un peu le fond de sa tirelire afin de participer à ce projet qui a de quoi motiver tous ceux qui ont la nature dans le sang.
En récompense, ils ont pu assister au travail de deux acrobates fribourgeois pour qui le mot vertige ressemble à une aimable plaisanterie. Ce potentiel nid de balbuzard, installé dans une réserve fermée au public, fait partie d’une série de 22, tous situés dans la région des trois lacs. Le principe est simple. Sachant que les mâles ont une forte propension à rester fidèles à leur point d’origine, les membres du projet comptent sur le fait qu’ils y reviennent, ce qu’a fait Arthur l’an dernier déjà.
Lorsqu’il retournera de sa nouvelle migration, ces tout prochains jours pour autant qu’il ne lui soit pas arrivé malheur, il ne manquera certainement pas de voir et d’apprécier la belle plateforme que les ornithologues ont préparée pour lui. Alors, ses appels lui permettront peut-être de capter l’attention d’une femelle de passage, auquel cas, si tous les voyants devaient passer au vert, la reproduction de ce noble rapace redémarrerait en Suisse, ce qui ne s’était plus jamais produit depuis 1914. Victime de persécution et de la récolte intensive de ses œufs, le balbuzard n’était plus, durant toutes ces années, qu’un visiteur de passage lors de ses migrations. Pour que l’opération fonctionne, on croise les doigts... et les serres bien entendu!

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