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Course à pied

Deux passionnés pour sauver la tradition

Le champion Rolf Thallinger et Andreas Ruefer organiseront les célèbres 100 Km sur le parcours habituel dès l’an prochain, puisque les organisateurs des Courses de Bienne y ont renoncé pour 2021.

Auteur de sept podiums aux 100 Km de Bienne, le Seelandais Rolf Thallinger a triomphé une fois, en 2017.

par Sélim Biedermann


Pas de traditionnels 100Km de Bienne, une nouvelle fois après une année blanche due à la crise sanitaire? C’était sans compter sur Rolf Thallinger et Andreas Ruefer. Deux amoureux de l’épreuve qui entendent coûte que coûte la faire perdurer dans sa forme standard dès l’année prochaine. «Quand nous avons reçu l’information stipulant que la course ne se déroulerait pas sur le parcours classique, il nous est apparu évident que c’était à nous de l’organiser», explique l’homme aux sept podiums, vainqueur en2017 –avec trois 2esplaces et donc autant de3es.

Thallinger, cette figure de la «Nuit des nuits», peut s’appuyer sur la collaboration d’un coureur biennois qui ne boucle peut-être pas cet effort ultime comme lui en seulement7h26’07 –le record personnel du Seelandais, datant de2015– mais qui se plaît tant à y prendre part, avec sept éditions à son actif. En témoigne le tatouage sur un mollet de Ruefer, soit le logo des 100Km. Tous deux n’ont pas hésité à se lancer, alors que les organisateurs des Courses de Bienne ont, eux, opté pour un plan B les11 et 12juin2021 en ce qui concerne leur épreuve phare: une boucle de 20km à effectuer à cinq reprises. Une décision prise en raison des directives par rapport au Covid-19 différentes selon les cantons (Berne et Soleure), ainsi que des défis logistiques et financiers immenses qu’implique la situation extraordinaire actuelle, ont-ils expliqué.

Action à long terme
Le tracé originel s’offrira ainsi quand même aux spécialistes de longue distance, en septembre ou en octobre. «Il était clair que nous n’allions pas organiser cela en même temps, aux dates habituelles. Et en plein été, il ferait trop chaud, car tout le monde n’atteint pas la ligne d’arrivée au petit matin comme moi», souligne Thallinger. Débordant d’enthousiasme, le quinquagénaire ajoute: «Comme ça, les coureurs auront la joie d’avoir deux possibilités de s’inscrire. Ils pourront participer à la course qu’ils désirent, ou même aux deux, à eux de juger.»

Côté organisation, l’entrain conjugué des deux compères ne s’arrêtera d’ailleurs a priori pas après2021, malgré que l’association Courses de Bienne –son président est Martin Reber–, l’agence Eventra en tant que nouvelle direction avec Lukas Hohl et son équipe parlent d’une solution provisoire pour cette 62eédition des 100Km. Une annonce à laquelle Thallinger et Ruefer n’accordent que peu de crédit... «Pour nous, l’année prochaine, ce sera le premier pas», prévient sans détour l’ex-vainqueur. «Nous entreprenons une action pour sauver à long terme la tradition et l’histoire phénoménale de cette course.»

L’aspect traditionnel de l’épreuve serait-il en péril? D’après eux, c’est un fait. «Pour des raisons logistiques et financières, l’éventualité de renoncer à ce parcours de 100kilomètres, qui demande aussi beaucoup de bénévoles, avait déjà été évoquée voici six ou sept ans, sous l’ancienne direction de Jakob Etter. Et cette discussion est revenue successivement en2017 et2018. Andreas et moi avions alors essayé de convaincre les sceptiques, nous nous sommes battus pour éviter pareil développement. Et maintenant, c’est toujours la même chose», estime Thallinger.

«Une question de rêve»
Il n’est ainsi pas question pour lui et Ruefer de modifier de la sorte un si célèbre rendez-vous. «On veut simplifier et adapter l’organisation des 100Km, et non pas simplement abandonner le tracé, ce qui est la chose la plus facile à faire. Il y a certainement d’autres mesures à prendre.» Le champion seelandais tient à l’habituel parcours comme à la prunelle de ses yeux. «C’est une question de rêve», lâche-t-il carrément. «Une boucle, cela s’avère moins motivant. Elle enlèverait le côté mythique, avec la traversée de villages et cette atmosphère si particulière, où l’on entend les bruits que font les animaux durant la nuit. Cette course est fantastique, très spéciale, incomparable à une autre. C’est une expérience à vivre. Et un spectacle qui dure depuis1959.»

Convaincant. Mais de là à savoir, afin de demeurer pleinement dans la tradition, si le futur fruit du travail de Thallinger et Ruefer portera l’appellation connue loin à la ronde... On peut en douter. «Bien que beaucoup de questions restent à résoudre, on part du principe que l’on garde le nom. Mais on verra. Le principal est que ça puisse avoir lieu.»

 

Une seule distance

Au contraire des multiples possibilités d’épreuves qu’offrent les Courses de Bienne, le futur «bébé» de Rolf Thallinger et d’Andreas Ruefer ciblera uniquement les aficionados de l’effort le plus conséquent. «Ce sera plus simple, on va se concentrer sur le parcours des 100Km», signale le premier nommé. «Mais, même si tout n’est pas encore défini à ce niveau-là, nous proposerons diverses catégories. On pourra courir seul, en couple, en équipe, en estafette...»

De quoi alléger le programme classique. «Nous essayons de penser l’événement d’une manière fraîche. Avec la volonté d’en réduire la durée, étant donné qu’actuellement les stands ouvrent le jeudi vers midi et qu’il se finit tard le samedi soir. Il n’y aura en outre qu’un seul départ, alors qu’ils sont étalés entre21h et23h dans la forme existante. Ceci permettra de diminuer les heures barrées pour le trafic», lance Thallinger, qui semble déjà passablement au clair dans ses idées.

 

Déjà une douzaine de membres au comité, plusieurs bénévoles ainsi que de potentiels sponsors

Dans un premier temps, les deux acolytes, actifs dans le marketing et surtout guidés par une passion commune, ont proposé leurs services dans le but de succéder à Fränk Hofer à la direction des Courses de Bienne. Mais dès qu’ils ont appris la volonté de passer à une épreuve en boucles pour2021, ils ont fait marche arrière. «Nous ne sommes pas intéressés par autre chose», répète Rolf Thallinger. «Notre motivation, c’est vraiment d’organiser les 100Km sur le parcours traditionnel.»

Une entreprise prenant rapidement forme pour celui qui possède une solide expérience dans la mise sur pied de manifestations –le Seelandais a notamment occupé pendant quatre ans la fonction de directeur du Grand Prix de Berne et travaillé pour diverses associations sportives, comme Swiss Swimming–, associé à un Andreas Ruefer ayant développé par le passé les Courses de Bienne sur les réseaux sociaux et étant par ailleurs aujourd’hui responsable médias du HCBienne. Un nouveau comité, riche d’une douzaine de membres, tous bénévoles, a en effet vite été créé. «Nous avons tout de suite trouvé des adeptes de course à pied ou de sports d’endurance intéressés à nous aider. La plupart sont d’ailleurs d’anciens participants aux 100Km de Bienne», se réjouit Thallinger. «Et on reçoit de surcroît tous les deux jours des demandes de bénévolat, dont certaines qui proviennent d’Allemagne.»

Un constat fort encourageant, auquel s’ajoute le signalement de plusieurs possibles partenaires. «On a déjà pris des rendez-vous dès cette semaine avec des sponsors potentiels, qui ont affiché leur intérêt sans aucune démarche de notre part», note-t-il avec bonheur. «On a encore le temps, mais c’est super!» Bien sûr, sponsoring et inscriptions ne suffiront pas financièrement. «Il nous faudra des tiers, par exemple des donateurs ou un club de soutien», glisse-t-il, confiant. A ce propos, côté budget, cela demeure pour l’heure un peu flou. «On est en train d’en élaborer grossièrement. Il est toutefois trop tôt pour pouvoir le fixer. Mais on va essayer de rester raisonnable et flexible.»

En tout cas, le projet de Thallinger et Ruefer se situe sur de bons rails. Ce ne sont pas eux qui diront le contraire: «On y croit!»

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