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Hockey sur glace

Un maillot au plafond, les pieds bien sur terre

Plus d’une année et demie après avoir mis fin à sa riche carrière, Mathieu Tschantré va rejoindre son idole Olivier Anken sous les combles de la Tissot Arena, vendredi soir. Malgré ça, l'ancien capitaine du HC Bienne ne s’envole pas.

«Je suis juste un gamin normal qui a eu la chance de faire ce qu’il aimait durant 20 ans dans son club de cœur», savoure Mathieu Tschantré (Copyright Peter Samuel Jaggi / Le Journal du Jura)

Christian Kobi

Cette fois, ça y est, c’est le grand jour! Ce vendredi soir, dans une Tissot Arena qui affichera complet pour la première fois depuis le 15 février 2020 – un derby face au CP Berne, déjà, dans le monde d’avant –, le No 12 de Mathieu Tschantré sera officiellement retiré et accroché au plafond de la Tissot Arena. Un honneur que l’éternel capitaine du HC Bienne, 20 saisons et 899 matches avec son club de cœur au compteur, n’est que le deuxième à connaître.  
 
Mathieu Tschantré, dans votre tête, avez-vous déjà visualisé votre No 12 accroché à côté du 30 de votre idole, Olivier Anken?
Non, je ne veux pas trop jouer avec les émotions. Pendant toute ma carrière, j’ai mis en place une sorte de système de management émotionnel qui m’a permis de tenir sur la durée. J’espère pouvoir garder le contrôle lors de cette soirée, d’autant plus que je serai pas mal sollicité, à droite et à gauche. Ce n’est pas plus mal, cela m’évitera de trop réfléchir. 
 
Combien de personnes avez-vous invité pour cette soirée? 
(Il réfléchit) Entre 30 et 40 je crois. Mais c’est une organisation à la Mathieu Tschantré, très freestyle et improvisée, via un groupe WhatsApp. Je ne suis vraiment pas doué pour organiser des événements de ce genre. Mes proches y sont habitués, ils sont déjà contents quand il y a un gâteau sur la table pour un anniversaire. 
 
Qui retrouve-t-on dans le lot? 
La famille, évidemment, quelques collègues, des amis et anciens coéquipiers, comme Emanuel Peter ou Patrick vonGunten. C’était très difficile de faire des choix. Si j’avais pu inviter tous les gens qui ont été importants pour moi durant ma carrière, j’aurais rempli le stade sans problème. Je suis reconnaissant envers tellement de personnes. 
 
Ce maillot retiré, ça signifie quoi pour vous? 
Lors des premières discussions à ce sujet, quand je jouais encore, je ne voulais pas en entendre parler, de peur que ça influence mes performances. Aujourd’hui, c’est là, c’est concret. C’est quelque chose qui me remue beaucoup en ce moment. Je commence à réaliser ce que cela signifie, tout ce que j’ai fait durant ces 20 années. Un jour, quand il n’y aura personne à la patinoire, je prendrai cinq minutes pour regarder en l’air et savourer. 
 
Pourquoi le No 12, en fait?
J’ai commencé avec le 14, mais en arrivant chez les juniors-élites, il ne restait que le 10 et le 12. Patrick von Gunten a pris le 10, moi le 12. Ce numéro n’avait aucune signification particulière pour moi. 
 
Avez-vous récemment parlé avec Olivier Anken, dont le maillot a été retiré en 2015? 
Pas encore. Mais quand je le croiserai, j’aurai deux ou trois questions à lui poser. «Oli» est une légende, c’est mon idole. Il sait ce que cela représente pour moi d’être à ses côtés. Quand j’étais gamin et que j’attendais devant le vestiaire, j’avais déjà l’impression d’être proche de lui. C’est resté avec les années. 
 
Et vous, vous vous considérez comme une légende?
Absolument pas. Moi, je suis juste un gamin normal qui a eu la chance de faire ce qu’il aimait durant 20 ans dans son club de cœur. 
 
En raison de la naissance de votre troisième enfant, puis de l’annulation des play-off, vous n’avez pas pu atteindre le cap des 900 matches. Est-ce que cela vous titille de rechausser les patins juste pour ça? 
J’ai l’impression que ça me démangera de jouer pendant encore 10 ans. Mais il faut se rendre à l’évidence, le train est passé. Si je reçois une charge aujourd’hui, je finis par terre et ma soirée est terminée (rires). 

Que ressentez-vous aujourd’hui quand vous arrivez au stade?
Quand je suis à la maison et que je regarde un match à la télévision, j’ai beaucoup de détachement. Mais dès que j’arrive à la Tissot Arena, que je sens l’odeur de la glace, l’ambiance, la musique, que je vois les joueurs qui s’échauffent, je n’ai qu’une envie: enfiler mon équipement et y aller. Je sais que cela fait partie d’un processus et qu’il faudra un certain temps pour tourner définitivement la page. 
 
Avez-vous assisté à beaucoup de matches depuis la fin de votre carrière, au printemps 2020? 
La saison dernière, j’ai surtout suivi le HCBienne à la télévision. J’étais un spectateur passif, je faisais d’autres choses en même temps. Pour moi, il était important de prendre mes distances avec l’équipe, avec le hockey. Au final, je suis allé quelques fois sur place, avec zéro spectateur. C’était bizarre, étrange. Cette saison, avec le retour du public et tout, je suis à nouveau plus dedans.
 
Rester dans le monde du hockey après la fin de votre carrière, ça ne vous a jamais intéressé? 
Assez tôt, j’avais décidé que quand j’arrêterais, je voulais faire tout autre chose. Je suis ravi de ce choix aujourd’hui (réd: il est gérant de fortune chez Fisc-Center, fiduciaire dont il est un des associés). 

Vous arrive-t-il quand même de rechausser les patins?
Oui, récemment je suis allé deux fois donner un coup de main à Philipp Wetzel, qui est en charge des M11 du HC Bienne, où joue l’un de mes fils. C’était cool, j’y ai pris beaucoup de plaisir. Et la semaine dernière, j’étais aussi à un entraînement avec des M15 à Zuchwil en compagnie de Sven Dick. Mais pour faire entraîneur, il faut être à 100% dedans. Et ce n’est pas ce que je souhaite en ce moment. 
 

Au HC Bienne, une affaire d’évidence
A l’inverse du CP Berne, qui a déjà retiré les numéros de 13 joueurs, le HC Bienne se montre plus sélectif avec ce genre d’honneurs. Après le No 30 d’Olivier Anken, le maillot No 12 de Mathieu Tschantré n’est que le deuxième à être sorti de la circulation. Contrairement à son voisin, le club biennois se refuse à établir un catalogue de critères précis. «Pour nous, le conseil d’administration et la direction, il faut simplement que cela relève de l’évidence», indique le directeur général Daniel Villard. Ce fut le cas concernant Mathieu Tschantré.
 
Et quid d’anciens joueurs emblématiques ayant eux aussi marqué l’histoire du club? «Après le déménagement dans la Tissot Arena, nous en avons discuté et sommes arrivés à la conclusion qu’Olivier Anken devait être le seul. Peut-être qu’une autre direction verra les choses différemment à l’avenir, mais pour notre part, nous nous en tenons à cette décision», coupe Daniel Villard. 
 

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