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De Johnny à Johann: la grogne

Il a beaucoup été question d’argent, hier, au Rathaus

Roberto Bernasconi n’a pas convaincu la majorité de droite du Grand Conseil. Stéphane Gerber

Pierre-Alain Brenzikofer

Forfaits fiscaux, sociétés offshore, comptes annuels du canton: les députés ont montré qu’ils savaient compter les sous à la mode de chez nous, hier, au Rathaus. Ils ont commencé par suivre leur Commission des finances, qui venait d’examiner les comptes 2014 du canton.

Comme ces derniers se soldent par un excédent de revenus de 211 millions, le plénum n’a évidemment pas fait la fine bouche et accepté ce rapport par 145 voix sans opposition et une abstention.

Malgré ce résultat qualifié de réjouissant et dû à d’inattendues rentrées fiscales, la commission ne voit néanmoins pas de raison de s’écarter du cap des économies: «L’équilibre financier reste précaire et un certain nombre de risques subsistent», avait-elle fait savoir avant la session.

Hier, le Parti socialistea profité de l’occasion pour rappeler qu’il était opposé à toute baisse d’impôt, pendant que les radicaux ont martelé, malgré leur joie  face à ce bon résultat, qu’à l’avenir, il faudrait continuer à faire preuve de discipline. A l’UDC, on s’est déclaré «pas euphorique du tout», ces résultats étant uniquement dus aux rentrées fiscales.

En musique, tout ce qui précède pourrait véritablement se résumer à «Same old blues».

«En finir avec cette affaire»

Par ailleurs, le Grand Conseil a estimé superflu de mener un audit indépendant des affaires offshore de sociétés établies dans le canton. Il a aussi refusé l’ouverture d’une enquête sur les autorités fiscales cantonales après les remous liés à l’optimisation fiscale du groupe Ammann, du nom de l’actuel conseiller fédéral Johann Schneider-Ammann.

Deux motions déposées par les Verts et par le Groupe PS-JS-PSA ont ainsi été nettement rejetées par le plénum. La majorité de droite a jugé que suffisamment de rapports avaient été produits sur la pratique de l’Intendance cantonale des impôts en matière d’exonération fiscale. Le législatif a ainsi suivi la recommandation du gouvernement.

La manière dont l’intendance des impôts du canton a taxé, à compter de 2004, la société anonyme Ammann Group Holding (AGH) a fait l’objet de critiques. Il lui est notamment reproché de ne pas avoir intégré aux résultats commerciaux de l’AGH, dont le siège est dans le canton de Berne, ceux de deux de ses entreprises offshore.

«Il faut en finir avec cette polémique qui fait du tort au site économique bernois, s’est écriée la directrice des Finances Beatrice Simon. Dans cette affaire, il n’y a pas d’infractions pénales à signaler. Ni du côté du groupe Ammann, ni de celui de l’Intendance cantonale des impôts.»

A noter encore que le Parti socialiste a déjà dénoncé cette passivité dans un communiqué furibard.

Echec pour Roberto Bernasconi

Enfin, Roberto Bernasconi (PSJB, Malleray) n’est pas parvenu à imposer son postulat relatif aux forfaits fiscaux. Il souhaitait en effet que le gouvernement fasse étudier, par une instance indépendante, la situation des 180 bénéficiaires de forfaits fiscaux sur le territoire cantonal. Hélas pour lui, sa requête a été repoussée par 87 voix contre 42.

Hier, après avoir prononcé quelques mots en allemand avant de se reprendre pour indiquer que la Députation lui interdisait cette pratique, le député a cependant glissé: «J’espère ainsi avoir attiré votre attention!» Il ne s’adressait évidemment pas aux francophones.

Plus sérieusement, l’homme a clamé que son intervention n’était pas dirigée contre les forfaits fiscaux, puisque le peuple a voté en leur faveur. «Je demande simplement de mieux contrôler les 180 cas du canton de Berne de manière indépendante.»

L’UDC a balayé la requête en relevant que dans l’exposé de ses motifs, l’auteur du postulat s’appuyait sur un cas lucernois.

Le Parti bourgeois-démocratique a pour sa part relevé que cette intervention sous-entendait que les fonctionnaires bernois ne faisaient pas leur boulot: «Il faut en finir avec ce bashing. Ce postulat est inutile et superflu.»

Au nom  des Verts, le Curgismondain Pierre Amstutz s’est demandé si on pouvait se fier à la taxation des autorités: «Si on cherche à traquer les profiteurs dans le social, pourquoi refuse-t-on de faire de même avec les forfaits fiscaux?»

 L’homme a été appuyé par Peter Gasser (PSA, Bévilard), lequel a rappelé que 600000fr. avaient été dépensés par le canton pour contrôler d’éventuels abus dans le social: «Par ailleurs, je doute que Johnny Hallyday soit resté six mois et un jour à Gstaad», a-t-il persiflé.

Entre 800 et 180

«La semaine dernière, nous avons bien accepté sous forme de postulat une motion demandant de supprimer 800 postes dans l’administration.Moi, je demande uniquement de contrôler 180 dossiers. Cela signifierait deux à trois jours de travail, à effectuer par un organe indépendant.»

Beatrice Simon, pour sa part, a affirmé qu’elle n’avait aucun doute à ce sujet: «L’Intendance cantonale des impôts applique les règles, tout comme le Contrôle des finances. Je rappelle accessoirement que le secret fiscal équivaut au secret de fonction.Le violer a des conséquences pénales.»

De quoi mener à ces portes du pénitencier tant chantées par ce bon Johnny Hallyday qui, accessoirement, ne profite plus du forfait fiscal depuis un bon moment?

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