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Bienne: Centre Pasquart

De l’étrangeté à l’humour noir

Une installation, des photos et des gravures pour la nouvelle exposition estivale

Un ciel nuageux de chambres à air surplombe l’installation de Michael Sailstorfer. LDD

Marjorie Spart

Durant la période estivale, le Centre Pasquart propose une triple exposition aux visiteurs. Et explore trois genres et univers différents: la sculpture (au sens large) de Michael Sailstorfer, les photos de Viviane Sassen et les gravures de Martin Ziegelmüller.

Michael Sailstorfer Cet Allemand de 36 ans est considéré comme l’un des plus importants représentants de la jeune génération d’artistes conceptuels et créateurs d’installations allemands. A Bienne, il présente son œuvre D.A.V.E.L.O.M.B.A.R.D.O. Pour cette installation, Michael Sailstorfer a décomposé une batterie et a disséminé les éléments dans les galeries et les couloirs du Pasquart. Toutes semblent autonomes mais reproduisent un solo de batterie... morcelé.

Dans ce brouhaha ambiant aux rythmes saccadés, «le visiteur se demande à quoi ça rime. Au fil des sons et de ses déambulations, il en arrive à faire partie de l’œuvre», commente Damian Jurt, commissaire de l’exposition.

Aux côtés de cette installation, l’Allemand expose une série de masques métalliques, une salle remplie de «nuages» – des chambres à air de camions –  et encore un chat empaillé fixant le plafond. «L’essence même de cette exposition est de la concevoir comme un corps composé d’œuvres créé à partir de différents médiums», explique le curateur.

Viviane Sassen Changement d’univers avec les photographies de Viviane Sassen. La Hollandaise, spécialisée dans le design et la mode, propose une collection de clichés réalisés dans une communauté isolée du Surinam, qui vit sans eau courante, ni électricité.
«La caractéristique principale du travail de Viviane Sassen est de croquer l’instant présent, sans trop de mises en scène», détaille Felicity Lunn, directrice du Centre d’art du Pasquart.

La photographe a en effet été saisie par la nature débordante de ce coin de pays d’Amérique du Sud. «Mais elle met aussi en exergue des objets du quotidien, comme un seau et des gants en plastique ou un couteau de cuisine qui ont atterri là un peu par hasard et qui détonnent avec la nature omniprésente», poursuit Felicity Lunn.

Relevant une sensibilité particulière pour la nature, les contrastes et les formes, l’artiste aime mettre en lumière les détails de ses compositions. Ainsi, elle ne photographiera pas les visages des gens, mais leurs mains, leur profil ou leurs pieds émergeant de l’eau. «L’immédiateté qui ressort de ses clichés en renforce la poésie», assène la directrice du Centre d’art.

Martin Ziegelmüller

Le troisième artiste qui expose ses œuvres dès aujourd’hui au Pasquart est un homme plus connu dans la région. Martin Ziegelmüller, qui vient de fêter son 80e anniversaire, réside à Vinelz, sur la rive sur du lac de Bienne. Ce malicieux et dynamique octogénaire s’est fait connaître dans les années 70 déjà par ses œuvres graphiques, ses huiles et ses aquarelles.

Martin Ziegelmüller présente ses gravures apocalyptiques dans la Salle Poma. ©Peter Samuel Jaggi/Journal du Jura

Présent hier dans la Salle Poma où il expose plus de 110 gravures, il explique avec beaucoup d’humour qu’il est «très heureux et honoré d’exposer dans cette belle salle», et que cette décision l’a empêché de dormir durant plus d’une semaine! «Je n’étais pas certain que ça en vaille la peine», a-t-il confié modestement.

Cette exposition est consacrée à deux cycles de gravures qui révèlent les visions apocalyptiques – et parfois amusantes – du rapport entre l’Homme et la nature qu’a l’artiste. Sorcières, nature inquiétante, paysages dévastés, les gravures de Martin Ziegelmüller offrent un brin d’humour noir aux visiteurs. L’artiste considère la gravure comme une soupape: «Elle me permet de libérer la pression des idées qui perturberaient sinon sensiblement ma peinture. Mon œuvre imprimée révèle que j’ai développé un humour noir.»

Le premier cycle «Rauch der Hexenfeuer» a été réalisé dans les années 1990. Il est inspiré des atrocités commises durant les guerres de Yougoslavie. Ce cycle est confronté à d’autres œuvres faites en 2013 et 2014, intitulées «Teilchenbeschleuniger». «Vingt ans séparent ces deux groupes de gravures et on peut y voir une évolution lorsqu’on les confronte», détaille Felicity Lunn.

Lorsqu’on lui demande de décrire sa dernière série de gravures, Martin Ziegelmüller dit s’être inspiré du CERN: «Il y a en effet des physiciens, mais cela représente une métaphore plus vaste. Je voulais montrer les choses que nous connaissons sans même les voir. Nous savons que les atomes existent, mais personne n’en a jamais vu un!», illustre-t-il.

Centre Pasquart:
Cette nouvelle triple exposition est vernie cet après-midi à 17h. Elle est visible jusqu’au 13 septembre.www.pasquart.ch

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