Vous êtes ici

Abo

Histoire d’eau

Echine de taille dans la patte de l’Ours

Mauvaise surprise pour François Vorpe. Nouveau propriétaire de l’hôtel de l’Ours, il a décelé d’énormes problèmes liés à l’écoulement des eaux usées. Les précédents propriétaires se voilent la face.

L’hôtel de l’Ours: et maintenant, ce sont les eaux usées du bâtiment qui posent problème. Photo: LDD

Par Pierre-Alain Brenzikofer

On’ira pas jusqu’à parler de douche froide, puisqu’il sera ici question d’eaux salement usées. Toujours est-il que François Vorpe, nouveau propriétaire de l’hôtel de l’Ours, à Bellelay, ne s’attendait pas à une telle catastrophe. Pour mémoire, Pat Lerch et Adolf Saurer, les anciens propriétaires, ayant choisi de jeter l’éponge après les graves dégâts d’eau qui ont littéralement ravagé le bâtiment, il s’était porté acquéreur. Les précités avaient réhabilité de fond en comble un bâtiment historique jusqu’ici propriété de l’Etat de Berne. De quoi décrocher le prestigieux label Swiss Historic Hotels.

Le problème des dégâts d’eau ayant pu être réglé avec les assurances, les travaux de réhabilitation auraient dû commencer au début de l’année. Toutefois, en vieux routier du bâtiment, François Vorpe a émis quelques réserves à l’achat, vu qu’il s’agit d’une antique bâtisse. Il a tout d’abord repéré une fente sur la façade est. Surtout, il a décelé plusieurs bizarreries au niveau de l’écoulement des eaux usées. Avec son fils Fabien, qui s’occupe de ce vaste chantier, il a donc décidé de mandater une maison spécialisée pour procéder à une cartographie au moyen d’une caméra. Le moins qu’on puisse écrire, c’est que le rapport final est à la fois clair et édifiant.

«Nous savons désormais qu’une partie des écoulements, y compris ceux des lieux d’aisance, vont directement dans les drainages de l’immeuble, soit dans des tuyaux en béton avec trous. Une autre partie passe par la cuisine et le corridor dans des tuyaux beaucoup plus petits qu’à l’étage, sans soupapes et sans siphons. Dans certaines chambres, l’isolement consiste en un simple couvercle en béton. Dans le restaurant, enfin, c’est encore plus surprenant: il y a tout simplement une absence totale d’écoulement...»

Risques sanitaires
Pour François et Fabien Vorpe, il était impensable de ne pas bouger, même si la situation actuelle a prévalu durant des décennies. «Ce serait faire fi d’importants risques sanitaires à venir», clament-ils.

Forcément, le nouveau propriétaire a pris contact avec les anciens, qui se sont déclarés «pas surpris, mais pas au courant»... Ce qui étonne quand même François Vorpe, eu égard à l’odeur dégagée par ces installations défectueuses. Odeurs qu’on a mises jusqu’ici sur le compte de la campagne, de l’écurie toute proche, et on en oublie, allez savoir.

Toujours est-il que cet examen a retardé le début des travaux de réhabilitation rendus nécessaires par l’inondation.

Et comme si cela ne suffisait pas, la remise aux normes des écoulements aura pour conséquence le démontage des pierres d’époque recouvrant le corridor. Des pierres qu’il faudra numéroter et éviter de casser avant de les faire retrouver leur place, le bâtiment étant protégé par le patrimoine. Oui, un travail titanesque et très coûteux, qui devra être effectué par des spécialistes. Au moins, avec de nouvelles canalisations, il permettra aux eaux usées de l’Ours de rejoindre enfin la Step!

L’art de faire le rond dos
Reste à savoir qui va payer cette colossale facture. Les propriétaires précédents? «Pour le moment, tous font le rond dos», constate notre interlocuteur, pour le moins désabusé. Ceux qui lui ont remis l’affaire signalent qu’ils n’étaient au courant de rien et qu’ils se sont fort bien accommodés de la situation... Quant au canton de Berne, l’ancien propriétaire, il a signifié à François Vorpe qu’il ne lui avait rien vendu – et pour cause –, donc qu’il n’était pas concerné.

Eu égard à cette fâcheuse découverte, François Vorpe aurait pu renoncer à son acquisition. Mais, dit-il, par amour de la région, il ne le fera pas: «Si je me retire, ce bâtiment restera vide durant des décennies et c’en sera fini de son histoire, prédit-il. Alors, nous allons commencer les travaux avec mon fils, en prenant le risque que personne ne vienne à notre secours...»

Faire un procès? Il ne rêve pas les yeux ouverts, l’entrepreneur tavannois. Mais il s’avoue cependant choqué qu’un bâtiment historique ait fonctionné durant des décennies dans de telles conditions d’hygiène. Bref, à défaut d’attaquer, il tentera cependant de se défendre par rapport à ce défaut caché.

«Nous savons pouvoir compter sur le soutien de Jura bernois Tourisme, des milieux proches de l’abbatiale et même des gens de Patrimoine bernois qui suivront de très près les travaux de rénovation.»

Hypothétique soutien
Reste à savoir si l’un de ces milieux et/ou les anciens propriétaires proposeront une aide financière. Actuellement, rien n’est moins sûr. Dans ce contexte, François et Fabien Vorpe préfèrent positiver en évoquant les attentes de la région quant à la réouverture de cet établissement phare. Une réouverture, problèmes d’eaux usées obligent, qu’il ne faut pas espérer avant l’automne, voire la fin de l’année.

Le temps de trouver le ou les oiseaux rares avides et surtout à même de relever ce beau défi.

Sur le futur contrat? Respect du patrimoine et bonne table mettant en valeur les produits régionaux. Kebabs et pizzas s’abstenir, haute gastronomie aussi. Le nouveau propriétaire mise certes sur une bonne table. Mais accessible à tous!

Articles correspondant: Région »