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Moutier

Deux visions et deux profils différents

En lice pour l’élection à la mairie, Marcel Winistoerfer et Francis Pellaton ont croisé le fer lors d’un débat non-public.

Appelé à se prononcer sur la candidature de son adversaire, Marcel Winistoerfer dit comprendre, mais être surpris de voir un novice de la politique se lancer. Francis Pellaton, lui, dit ne rien avoir contre son rival. Stéphane Gerber
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Catherine Bürki

D’un côté Francis Pellaton, citoyen de 67 ans, sans parti. De l’autre, Marcel Winistoerfer, conseiller municipal PDC âgé de 59ans. Jouissant de parcours forts différents, et d’idées parfois diamétralement opposées, les deux hommes se font face dans la course à la mairie prévôtoise. En vue de l’élection du 5juin, ils ont accepté de se prêter au traditionnel jeu du débat.

Réunis pour la première fois, dans une petite salle d’un établissement prévôtois, les candidats se saluent cordialement. Plutôt calme, la campagne électorale qui se joue à Moutier n’a fait naître ni tension ni animosité entre eux. Pas de quoi cependant les empêcher de défendre leurs opinions, avec force et conviction...

Les deux hommes ont très vite abordé leur principal point de désaccord: le vote communaliste du 18juin 2017. «Je ne veux pas que la ville soit rattachée au canton du Jura. J’aimerais et pense pouvoir rallier les personnes opposées au départ de Moutier», argue d’entrée Francis Pellaton. Pour lui, la ville a aujourd’hui des acquis qu’il s’agit de conserver. «Nous avons notamment de nombreux emplois cantonaux et un hôpital. En partant dans le Jura, nous aurions tout à perdre.»

Quelle influence?
Pour Marcel Winistoerfer, la donne est évidemment toute autre. En tant que candidat de l’Entente jurassienne, il est convaincu que «les perspectives d’avenir sont bien meilleures dans le Jura». Au sein de l’Etat jurassien, le poids décisionnel de la ville au niveau de la politique cantonale serait décuplé et ses intérêts mieux défendus. «Ici, nous sommes un espèce de satellite de Berne!», regrette l’enseignant prévôtois.

Si les avis sont bien tranchés, reste surtout à savoir quelle attitude les candidats adopteront une fois élu. «En tant que maire, je pense que je n’aurai pas une grande influence sur le processus», indique MarcelWinistoerfer. Pour lui, le maire doit d’ailleurs faire preuve d’un certain devoir de réserve. «Je suis pour le départ de Moutier et tout le monde le sait. Mais je ne vais pas l’asséner tous les quarts d’heure.»

En cas d’élection, Francis Pellaton envisage pour sa part de se rapprocher du comité de campagne Moutier-Prévôté. «Je me tournerai sûrement vers lui pour voir qu’elle est sa stratégie. L’idée serait d’avoir un électorat pour que le non fasse surface en 2017.»

À l’heure d’aborder leurs priorités pour la ville, les candidats s’accordent à dire que le vote communaliste est un dossier crucial. «Cette élection n’est d’ailleurs pas banale. C’est avant tout l’affrontement de deux blocs, l’un voulant rejoindre le Jura et l’autre pas», relève Francis Pellaton.

Le maire de tous
Pour Marcel Winistoerfer, il ne faut toutefois pas que l’attention soit focalisée sur ce dossier. «C’est avant tout pour la ville de Moutier que je veux agir!» S’il est élu, le candidat entend être le maire de tous. En tant qu’autonomiste fortement engagé, y parviendra-t-il? «Oui. La question du vote ne représente qu’une petite partie de mon programme, fait-il remarquer. J’ai par ailleurs quitté mon poste de porte-parole du comité Moutier ville jurassienne.»

Francis Pellaton aussi ambitionne de devenir le maire de chaque Prévôtois. «Je pourrai me montrer très disponible et saurai être à l’écoute», garantit ce géomètre retraité. Pour en venir aux autres dossiers jugés prioritaires, il rappelle que la législature est en cours. «Je ne vais pas renverser le monde. Il s’agira de finir le mieux possible ce qui a été engagé.» Et d’indiquer qu’il y aura du pain sur la planche: «Il faudra veiller au bon déroulement de plusieurs dossiers, tels que l’école ménagère et le Technopôle.»

Garantir un suivi sera-t-il alors possible pour ce novice de la politique, qui rappelons-le n’a jamais assumé de mandats? L’intéressé en est convaincu. «Il n’y a pas besoin d’être politicien pour reprendre un dossier comme celui de l’école ménagère. Et je pourrai aussi compter sur le Conseil municipal pour m’épauler.»

Du côté de Marcel Winistoerfer, on mise également sur la continuité. «Il y a de nombreux dossiers à suivre et j’ai une confiance inouïe envers les responsables de dicastères. Ça fonctionne bien à Moutier!», garantit celui qui occupe un fauteuil au Conseil municipal depuis cinq ans. Malgré des finances municipales quelque peu mises à mal ces dernières années, il estime par ailleurs nécessaire de continuer à investir pour développer au mieux la ville.

Qu’en est-il des efforts à fournir pour rétablir la fortune? A ce propos, Marcel Winistoerfer ne veut entendre parler ni de hausse de quotité d’impôt, ni de coupes dans les subventions aux sociétés sportives ou culturelles. «S’il faut faire des économies, il faudra plutôt se tourner vers la structure de l’administration. Mais là aussi, la marge de manœuvre est ténue.»

Redynamiser la ville
La solution de Francis Pellaton pour renflouer le navire? Tout comme son rival, il voit d’un mauvais œil une hausse d’impôt ou baisse des subventions sportives. «Ayant été chef d’entreprise et ayant longtemps gravité au HCMoutier, je sais que ces mesures sont mal perçues», signale-t-il. «Le sujet est complexe et n’étant aujourd’hui pas membre des autorités, il m’est difficile d’avoir une solution toute prête.»

Au chapitre du développement de la ville, soulignons que les candidats ont un souci commun. À savoir le besoin de redynamiser le commerce local. «Ce n’est pas une mission facile. Il faudrait par exemple soutenir davantage le délégué au commerce local, ainsi que celui à la promotion économique pour attirer de nouvelles entreprises», estime Francis Pellaton.

«Je ne suis pas de ceux qui pensent que rien ne se passe à Moutier mais il est vrai que pour le commerce, nous avons un problème de taille critique», indique pour sa part Marcel Winistoerfer. Si la solution miracle n’existe pas, il dit  beaucoup attendre du passage de Moutier dans le canton du Jura.

«Delémont est très vite devenue un grand centre. De son côté, Moutier est mal perçue par le reste du Jura bernois du fait de sa majorité jurassienne et de sa façon de penser. Une incompréhension persiste et je suis sûr que rejoindre le Jura nous apporterait un nouveau souffle.»

De quoi faire bondir Francis Pellaton: «Si Delémont s’est développée, c’est parce que le commerce et l’industrie misaient sur un grand bassin de population, considère-t-il. Mais le potentiel a été surestimé et plusieurs grands magasins commencent à tirer la langue.» Et de conclure en se disant persuadé, à l’inverse de son rival, que «partir dans le Jura n’amènera rien à Moutier».

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