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Agricool Tour (2)

Tous ces produits du terroir

Après un concert à Cormoret, lundi, pour leur tournée, Tiffany et Christophe Meyer ont été accueillis à Saules, hier. Dans la ferme 100% bio et local de Roubina Kouyoumdjian et Elie Grosjean.

Quand on invite Christophe (et Tiffany) Meyer, il n’est pas inutile de prendre des forces avant d’attaquer le concert. Car les spectateurs sont constamment mis à contribution, comme ici pour «Le train rouge». Photo: ldd

Par Dan Steiner

Jusqu’au 18 août, Christophe Meyer sera accompagné des sa cousine Tiffany pour une tournée de 28 concerts dans les fermes de la région et du Jura. Le JdJ vous parle des six hôtes du Jura bernois et livre quelques morecaux de ces folles soirées.

Des groupies de Christophe Meyer, le couple Roubina Kouyoumdjian et Elie Grosjean? «Je n’aurais pas supporté de seulement laisser les autres l’inviter», se marre Madame. «Dans la région, c’est un peu ‹si t’as loupé Christophe Meyer, t’as loupé le clou de l’été›. En un soir, on double la population de Saules!» renchérit Monsieur.

Sur le ton de la blague, mais seulement à moitié – on parle quand même d’un sujet qui concerne Christophe Meyer... –, les propriétaires de la ferme à laquelle ils ont affublé le label bien officieux d’«Ici – produits naturels» font partie des habitués. En 2010 et 2015 déjà avaient-ils en effet accueilli triomphalement le Fou. Qui le leur a toujours bien rendu. Foi d’Elie Grosjean, quand «Le train rouge» passe, Christophe Meyer aboie, mais, surtout, «neuf personnes sur dix sont debout».

A peu de chose près, on y était: 163 personnes ont été annoncées comme faisant office de wagonnet, hier soir. On n’a pas réussi à faire se lever toute la salle. Mais pas loin.

«Pas vraiment rouge, pas vraiment noir, chuis un produit du terroooir.» Si ça fait la fierté de l’un des deux invités de la soirée, en duo avec sa cousine Tiffany, cette philosophie est également chevillée au corps des deux hôtes du lieu. «On pourrait gagner plus d’argent si l’on achetait à bon marché, mais on veut vivre avec des produits qu’on pense idéaux pour nous», martèle Elie Grosjean.

Davantage logique que bio
Car leurs burgers et leurs merguez qu’ils ont proposés aux spectateurs sont 100% issus de leur taurillon, transformé à Bévilard; farine et œufs de la ferme ont servi à Nancy Vorpe pour ses crêpes; les pains étaient faits avec leur engrain ou leur blé de Belprahon au levain naturel de la boulangerie Hofmann; la bière, de Blanche Pierre, était 100% jurassienne; le vin l’œuvre du vigneron prévôtois Aurèle Morf; les jus et sirops étaient maison; la goutte, c’était de la Souboziane. Le tout dans de la vaisselle réutilisable.

Par rapport aux autres années, les sodas ont disparu. «Les circuits courts», articule Elie Grosjean. «Notre idéal est que chacun puisse avoir accès à ces produits. Notre but depuis que l’on a repris la ferme: être autosuffisants et vendre le surplus s’il y en a.»

Retapée pour s’y installer au début de la décennie, la ferme, qui appartenait à son père, produit du bio. Sur 26 parcelles et 21 ha de surface utile. «Avant tu disais: ‹Je ne suis pas bio, mais je suis logique», lui lance Roubina. «J’essaie, en tout cas.» Pourtant, fin 2004, Elie Grosjean avait dénoncé son contrat de production bio. «Et j’ai racheté des produits chimiques. J’ai cru qu’il fallait brûler ces mauvaises herbes. J’ai épandu du glyphosate. C’était aberrant...»

Il rétropédale finalement après avoir commencé à cultiver des céréales anciennes. Une question de logique, encore une fois. «J’ai compris que pour être critique envers le label, il fallait aller aux séances...»

Depuis 2017, l’ancien menuisier-ébeniste de 40ans est de retour en bio, pour pouvoir échanger. Tant au niveau des produits cultivés par le couple qu’au niveau des idées. «Ce sont des gens possédant les mêmes idéaux. Car la concurrence est rude dans le monde agricole, où certains collègues n’en sont pas vraiment...»

Elie Grosjean, qui possède une cinquantaine de bovins, assume ses propos, maintient que le tout bio et/ou le sans-pesticides n’est pas une utopie. Il n’en défend pas moins l’agriculture nationale, menacée par les prix bas des denrées étrangères, par le libre-échange.

Lieu agriculturel
On en revient aux produits du terroir. Et aux échanges. Humains, surtout. Car quand le couple a construit la grange dans laquelle se produit désormais régulièrement «le Meyer», ils l’imaginaient déjà comme un lieu culturel pour différentes occasions. Travailleuse sociale en milieu scolaire, elle pratique le théâtre.

Depuis plusieurs années, ils organisent un vide-grenier, en clôture duquel divers groupes musicaux animent la soirée. «Ça a commencé en 2014. Le Bel Hubert, notre garagiste, y avait fait une répétition générale. C’est depuis là que c’est vraiment parti», expliquent-ils. Leur souhait: faire se produire une troupe théâtrale dans leur grange. Mais selon leur philosophie, leur logique. Bon, allez, salûûût.

Le prochain concert auquel Le JdJ assistera se tient le jeudi 25 juillet. Son hôte sera le Bison Ranch, aux Prés-d’Orvin.


Le couple Grosjean Kouyoumdjian devant son self-service de produits bio. Photo: DS

«Regarde ce cadre... C’est exceptionnel!»
Pour nous éviter de devoir nous percher sur les bottes de foin qui séparent la salle en deux pour compter les convives, ou mieux, demander à chacun d’où il vient, Christophe Meyer s’est chargé de quelques petits sondages. «Ceux qui étaient là en 2010, faites du bruuuit?» Quelques «wouhou!» timides. Rebelote pour 2015 et... 2010 et 2015. «Ceux qui étaient là en 2007, faites du bruuuit!» «Wouhou!» «Menteurs, j’étais pas là en 2007.»

Le ton est donné, d’autant que, un coup de sonde plus tard, on savait que les plus nombreux, c’était les Moutier. De quoi donner quelques idées de répliques au chauffeur de salle en chef...

Ceux qui ne le savaient pas l’ont donc compris, le trublion ajoulot était encore de retour dans le coin pour une nouvelle tournée rurale. D’ailleurs, qu’est-ce qui le fait revenir à Sau... «Mais, attends, regarde ce cadre... C’est exceptionnel!» On ne lui fera pas l’affront de lui demander s’il dit ça de chaque endroit où il se produit. C’est sincère.

Car force est de constater que Roubina Kouyoumdjian et Elie Grosjean ont mis les petits plats dans les grands, une nouvelle fois. «On a même rajouté cinq tables. Si toutes les places assises sont occupées, on peut mettre 380 personnes», sourit Madame. Il reste quelques places, par-ci par-là. Bon, mais, ces tables, elles supporteront le poids des... supporters du Meyer? «Elles doivent avoir 50ans. Elles tiendront», assure Monsieur. Affirmatif. Et quelque chose nous dit qu’elles serviront encore.

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