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Bobsleigh

Cette médaille d’argent vaut de l’or

Beat Hefti et Alex Baumann ont pris la 2e place derrière le duo russe

Beat Hefti et Alex Baumann ont apporté à la Suisse sa huitième médaille à Sotchi. Keystone

Rosa Khutor
Johan Tachet

La fusée suisse fend la glace de Sanski à plus de 130 km/h. Le bob helvète fonce vers la médaille d’argent. Une récompense méritée pour Beat Hefti et qui couronne huit années de dur labeur depuis ses débuts en tant que pilote. «Je voulais absolument cette médaille. J’ai mis tellement de cœur à l’ouvrage que je me sentais sous pression. C’est un rêve qui se réalise, mais c’est également un gros soulagement», clame-t-il en arborant fièrement un drapeau suisse autour du cou, en attendant que celui-ci s’orne d’un nouveau métal olympique. Le quatrième de sa carrière.

De pousseur à pilote

La collection de l’Appenzellois de 36 ans comprenait déjà trois bronzes glanés en 2002 et 2006 en tant que freineur de Martin Annen. Mais en 2007, Beat Hefti, considéré comme le meilleur pousseur de sa génération, n’appréciait plus ce rôle de l’ombre qui lui incombait. Cet ancien lutteur en avait plus qu’assez de ralentir et voulait accélérer sa carrière en prenant les commandes. Le succès fut immédiat pour ce beau bébé de 110 kg, puisqu’il remporta la Coupe du monde de bob à deux dès sa première saison en tant que pilote. Sa puissance à la poussée et son doigté au pilotage forçaient indéniablement l’admiration.
Toujours est-il que le charpentier d’Herisau peinait à confirmer toutes ses aptitudes lors des grands rendez-vous. Souvent à cause de la malchance. Aux Jeux de Vancouver, une chute à l’entraînement l’avait conduit à l’hôpital pour une commotion cérébrale. Un traumatisme physique et mental qui avait incité par la suite l’Appenzellois à redoubler d’efforts, lui qui n’en était déjà pas avare. «Il fallait rapidement tourner la page», dit-il.

Recrutement en… France

Pour ce faire, Beat Hefti s’en est allé recruter en 2012 le Français Eric Alard, dont le rôle a consisté à redonner confiance à une équipe de Suisse meurtrie par l’échec de Vancouver, où elle n’avait pas remporté la moindre médaille. «Ce n’était pas une revanche, mais nous devions perpétuer la tradition du bobsleigh en Suisse en nous maintenant au sommet de notre discipline», explique le nouveau coach, également ancien bobeur, qui a beaucoup travaillé mentalement avec  son poulain. «Beat Hefti est une bête physique et un grand pilote. Mais il a fallu lui faire prendre conscience qu’il avait le talent pour s’installer durablement aux avant-postes. Cela l’a motivé à travailler encore et encore lors des moments de doute pour se retrouver sur ce podium olympique.»

Les Russes intouchables

Une médaille d’argent qui vaut pratiquement de l’or pour Beat Hefti et son binôme Alex Baumann, tant l’équipage russe d’Alexander Zubkov semblait intouchable ces deux derniers jours sur les lacets glacés de la piste de Sanski. «Après ma grosse erreur lors de la première manche (réd: Hefti avait déjà concédé 21 centièmes à Zubkov), je savais que je ne pouvais que me battre pour la deuxième place. Surtout, que même sans cette faute, il aurait été impossible d’aller chercher les Russes.»
Des Soviétiques qui connaissaient bien évidemment leur piste de Rosa Khutor sur le bout des doigts pour l’avoir parcourue à plus de 500 reprises, soit 10 fois plus que les Suisses. «Cela fait partie du jeu. Ils s’entraînent toute l’année sur ce tracé», conclut un Beat Hefti fair-play et ravi de sa breloque d’argent.

Le retour très applaudi des «Rasta Rockets»

«Balance man, cadence man, trace la glace, c’est le cool Rasta!» Winston Watts et Marvin Dixon ont fièrement porté les couleurs du bobsleigh jamaïcain sur la glace olympique de Sotchi. Sans dreadlocks, mais toujours avec la même passion, les deux «Rasta Rocketts» ont perpétué la légende de leurs prédécesseurs.  «Nous voulions montrer au monde que la Jamaïque n’est pas morte», explique Watts (46 ans), qui participe pour la quatrième fois aux Jeux. Cela faisait 12 ans que l’île caribéenne n’avait plus eu la chance de voir l’un de ses équipages prendre part au grand raout mondial. Une participation, encore incertaine il y a deux semaines, rendue possible grâce à une aide financière de dernière minute de la part du Comité olympique jamaïcain, disposé, presque à contrecœur, à puiser dans son budget alloué à Usain Bolt et consorts. A Sotchi, les bobeurs jamaïcains ont été les athlètes les plus ovationnés après les Russes que ce soit lors de du défilé de la cérémonie d’ouverture ou lors des compétitions de bobsleigh. «Cette ambiance est indescriptible», sourit Marvin Dixon. «En Jamaïque, neuf personnes sur 10 ne connaissent pas le bobsleigh et pensent que ‹Rasta Rockett› n’était qu’une pure fiction.»

Mots clés: Bob, Suisse, jo, Sotchi, Médaille

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