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Point de vue

«Les Russes ont relevé ce défi de façon extraordinaire»

L’ancien conseiller fédéral Adolf Ogi en visite à Sotchi

Adolf Ogi à son arrivée en Russie. Keystone

Sotchi
Laurent Kleisl

Un jeune sapin à son côté, les pieds dans la neige, une image d’Epinal. C’est Adolf Ogi, alors président de la Confédération, adressant ses vœux au peuple suisse le 1er janvier 2000. Conseiller fédéral en charge des sports à son retrait fin 2000, le Bernois «formidable» est de passage à Sotchi pour une petite semaine. «Je suis arrivé jeudi après-midi», indique-t-il. «Il a fallu un peu de patience à l’aéroport, cela nous a pris deux heures avant de quitter l’endroit. A l’hôtel, tout est allé très vite. Bon, les chambres n’étaient pas encore tout à fait terminées!»
Cette visite à titre privé, l’UDC de Kandersteg l’a agrémentée, samedi après-midi, du match de hockey féminin entre la Suisse et le Canada, «une invitation de René Fasel», sourit-il. Sotchi, ses Jeux, son gigantisme, ses dérives, ce qu’en dit Adolf Ogi.

Adolf Ogi, entre argent, écologie et droits l’homme, Sotchi fait couler beaucoup d’encre. Le paradoxe, c’est que les Russes ont réalisé des choses formidables…
En moins de 10 ans, ils ont bâti ce que nous avons construit dans les Alpes, en Suisse, en France, en Autriche et en Italie, en plus de 100 ans. Ils ont relevé ce défi de façon extraordinaire. Naturellement, en Russie, les coûts ne sont pas d’une toute grande importance. Il faut respecter ce volontarisme et cette mentalité, qui n’est pas forcément la nôtre.

Le personnage de Vladimir Poutine ne fait-il pas de l’ombre aux JO?
En arrière-fond, évidemment, il n’y a pas que le sport, il y a le contexte politique et la place que la Russie entend occuper à l’échelle mondiale. Les Russes veulent montrer leur capacité à organiser, leur savoir-faire et leur puissance.

Justement, plutôt que de sport, ne doit-on pas parler d’une démonstration de puissance?
Non, je ne dirais pas ça comme ça. Malgré ce contexte particulier, le sport demeure au centre de l’événement. Poutine a fait construire toutes ces infrastructures pour le sport. Il s’est battu pour obtenir les Jeux et a mis le paquet pour les réaliser. Avec une manifestation pareille et, il faut bien le dire, leur engagement hors du commun, les Russes en profitent pour façonner l’image de leur pays. Mais la direction prise par le CIO peut faire discuter.

Les exigences du CIO et des grandes fédérations, notamment la FIFA, en matière de d’infrastructures, sont toujours plus élevées. Les dirigeants du sport mondial auraient-ils perdu le sens des réalités?
Ce constat n’est pas faux. Je suis allé voir ce qui se passe au Qatar et je me suis demandé comment il sera possible de jouer au football en juin avec une telle chaleur. Comme les Russes, les Qataris doivent tout construire, mais ils ont de l’argent pour ça. En réfléchissant sur Sotchi, la première question que je me suis posée concernait l’avenir de la région après les Jeux. Poutine veut organiser un Grand Prix de F1, il veut créer un centre de conférence; la Fédération russe de ski va lutter pour décrocher des épreuves de Coupe du monde. Le développement et l’avenir de cette région, de toutes ces infrastructures, seront très intéressants à analyser.

On sent de plus en plus de décalage entre le commun des mortels et les élites du sport mondial, alors que, par définition, le sport se veut populaire et rassembleur…
Ce sujet mérite réflexion. Je pense que les dirigeants du sport mondial commencent à comprendre que la valeur ajoutée des grandes manifestations risque de se perdre, aussi bien dans le football que pour les Jeux, étant donné que les gens, surtout en Europe de l’ouest, se posent beaucoup de questions. Est-ce là la bonne direction? Est-ce là l’idée que l’on se fait du sport? Est-ce qu’il ne faudrait pas revenir en arrière, aux bases, en réduisant par exemple le programme de Jeux? Les interrogations sont nombreuses. Le CIO doit quand même se rendre compte que l’image de marque n’est pas à la hauteur. Disons que le sport est pratiqué par les jeunes et les décideurs sont peut-être un peu plus âgés (rires)!

D’un point de vue pratique, c’est quoi le programme de vos Jeux?
La cérémonie d’ouverture, la descente, le ski de fond et le saut à skis. Je suis en nordique, je viens de Kandersteg, où j’habite l’hiver; je pratique d’ailleurs encore un peu de ski de fond. Mais aux JO d’hiver, pour moi, le sommet reste quand même la descente messieurs.

Mots clés: jo, Sotchi, Arrivée, Adolf Ogi, Jeux

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