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Automobilisme

Michael Burri doit se distinguer

Renault veut se mettre en vitrine dans le championnat du monde WRC3.

Croqué ici lors d’une édition passée du Critérium jurassien, le pilote prévôtois Michael Burri n’imaginait alors de loin pas prendre un jour part au championnat du monde WRC3 dans la peau d’un pilote d’usine. Archives Stéphane Gerber
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Sélim Biedermann

Michael Burri est en plein tour de chauffe à côté de Carcassonne. Ou plutôt dans un marathon de réglages, de perfectionnement de sa Clio R3T lors des tests effectués avant le championnat du monde WRC3 (lire ci-dessous), qui démarre jeudi prochain avec le rallye du Portugal. Soit le nouveau terrain de jeu du Prévôtois cette saison. Qui n’a, en fait, rien d’un jeu: ladite compétition s’apparente à une véritable consécration pour lui.

En ce sens, il s’agit d’assumer son nouveau statut de pilote officiel Renault, qu’il a obtenu grâce à sa victoire dans le Clio R3T European Trophy (lire nos éditions du 26 janvier et du 10 février). Une écurie qui comptera uniquement sur l’as du volant de Belprahon de 28 ans, accompagné de son copilote ardéchois Anderson Levratti, pour mettre en vitrine son petit bijou conçu il y a maintenant un an mais sans cesse amélioré.

La marque au losange signe en quelque sorte son retour cette année en championnat du monde WRC3 en y engageant une voiture officielle – et non pas semi-officielle comme l’an dernier. «Ce n’est pas quelque chose d’habituel, de stable», explique Tarik Ait Said, le sporting manager de Renault Sport Racing.

«Chez Renault, il y a eu une grande réorganisation sur le sport automobile en 2015, avec une ambition forte qui a été réaffirmée en ce début d’année. C’est-à-dire que nous sommes désormais tous réunis sous le même toit, que ce soit les Formule1 et les voitures de rallye, notamment. On est ravi de déployer nos efforts sur l’ensemble de la gamme.»

Titre presque impossible
Et la partie rallye est beaucoup plus associée au produit. Prendre part au championnat du monde WRC3 permet ainsi de mettre en avant la qualité de la mécanique, du châssis. «On veut démontrer toute l’expertise de Renault Sport, que la voiture est fiable.» Opération séduction.

«Grâce à notre implication dans le rallye, bien que l’on possède une longue histoire dans le domaine, nos filiales vont pouvoir animer la marque. Cela permet de leur offrir une plate-forme extraordinaire et très atypique par rapport aux circuits. Car en rallye, on est très proche de la voiture», détaille Tarik Ait Said.

Quoi de mieux, dès lors, que de décrocher le titre dans le championnat du monde WRC3? Soit la troisième catégorie en rallye, regroupant des voitures à deux roues motrices. «Nous n’avons que très peu de chances d’y parvenir», tempère aussitôt le manager.

«Notre engagement est limité à six manches. La raison se situe au niveau budgétaire.» En effet, en ne prenant part qu’à des épreuves européennes (lire le calendrier ci-contre), il sera bien compliqué d’amasser autant de points que ceux qui se rendent aussi en Chine, en Nouvelle-Zélande, au Mexique... «Nous ne partons pas à chances égales. On est défavorisé, c’est clair.»

«Un championnat dans le championnat»
Quelles attentes peut-on dès lors formuler envers son pilote dans une saison tronquée? «Notre but est que Michael Burri se retrouve dans les meilleures conditions possibles pour qu’il arrive à établir des performances de premier ordre. Nous restons réalistes, mais nos ambitions n’en demeurent pas moins élevées. On ne participe pas au championnat du monde pour y faire de la figuration. Il faut que l’on se distingue des privés, que l’on montre un haut niveau de professionnalisme car on représente notre marque», souligne Tarik Ait Said.

«Et beaucoup de nos concurrents font comme nous, il existe de ce fait une sorte de championnat dans le championnat. Si, au classement, on arrive derrière un pilote d’usine qui effectue le même circuit que nous, donc six courses, ce sera une déception. On va en tous cas essayer de faire le meilleur job possible dans cette aventure. On compte sur Michael!»

Une lourde responsabilité pèse sur les épaules du Prévôtois et de son copilote. Mais cela ne sert à rien de se mettre une pression inutile. «Le but de ce premier rallye est de voir comment nous et la voiture allons nous comporter. On va y aller crescendo», glisse Michael Burri.

Il n’en reste cependant pas moins gonflé à bloc, bien que le titre d’abord espéré semble inaccessible: «Nous sommes attendus, il va falloir se montrer à la hauteur. En fin de championnat, un top 5 serait magnifique!» Le grand défi qui va accompagner le pilote de Belprahon cette saison démarre au Portugal. Un pays qu’il gagne déjà demain en vue des premières reconnaissances.

 

«On ne sait pas ce qu’ils font sur la voiture»

TESTS Entre mercredi et aujourd’hui, Michael Burri et Anderson Levratti auront parcouru quasiment 400 km sur leur Clio R3T équipée des dernières évolutions technologiques – à peu près le même bolide avec lequel ils ont gagné l’European Trophy mais tout neuf.

Dans une petite semaine, avant même la première manche portugaise, longue de plus 350 km comme les autres épreuves du circuit, cela fera carrément l’équivalent de deux rallyes du championnat du monde. «Cela fait beaucoup! D’habitude, on n’effectue pas de développement, mais simplement une trentaine de kilomètres pour préparer nos courses», explique le Prévôtois depuis les environs de Carcassonne.

Et malgré le fait de rouler sur de la terre battue – comme lors des trois premières manches du championnat du monde WRC3 –, une conduite qu’il n’avait plus exercée depuis trois ans, ces tests se passent «vraiment bien», dit-il.

«C’est un gros challenge car le sol est très cassant, ça bouge beaucoup. Il faut rester dans les traces. Mais la voiture est très agréable, super à conduire.» Difficile de ne pas être aux anges dans sa nouvelle situation de pilote officiel Renault... Un environnement diamétralement opposé à celui qu’il connaît, «une autre atmosphère», lance le pilote du Jura bernois.

«Ces essais permettent à Michael de voir les différences avec sa voiture, en mieux!», sourit Tarik Ait Said, sporting manager de Renault Sport Racing. «L’associer aux préséances fait qu’il arrivera opérationnel au rallye du Portugal. Comme cela, il est déjà intégré à l’équipe, il apprend à travailler avec ses ingénieurs.»

Justement, c’est comment de disposer d’un team de professionnels qui est à ses petits soins? «C’est totalement différent! On ne sait pas ce qu’ils font sur la voiture», lâche Michael Burri, épaté. «Ils nous font rouler toute la journée et nous donnons ensuite notre ressenti. On est un peu des sortes de cobayes. C’est en tous cas super enrichissant de créer ces évolutions avec les ingénieurs. On emmagasine un maximum d’expérience. Et connaître quasiment par cœur la voiture est important pour le facteur confiance.»

Il s’agit aussi d’avoir une condition physique irréprochable afin d’avaler ces centaines de kilomètres. «C’est très physique», souffle Michael Burri, qui s’est principalement entraîné sur un vélo d’appartement ces derniers temps, Anderson Levratti ayant opté de son côté pour la course à pied.

«On a également fait attention à notre alimentation durant ces trois dernières semaines en suivant un programme de nutrition énergétique», signale le semi-professionnel, gérant de son garage à Tavannes. «On fait le mieux que l’on peut avec les moyens qu’on a.»

 

Le premier Suisse

«LE SUMMUM» «Je suis un type super heureux, je vis un rêve. C’est le summum où tout pilote voudrait arriver.» Michael Burri y croit encore à peine. «C’est une très grande fierté, pas grand monde a la chance de participer au championnat du monde.»

Le Prévôtois est d’ailleurs le premier pilote d’usine helvétique à s’engager dans cette compétition qui réunit les meilleurs spécialistes de rallye de la planète – certains l’ont déjà fait en privé.

«C’est un privilège, je prends cela comme une bénédiction. Je vais porter les couleurs de la Suisse le plus haut possible», promet-il. A ce propos, les responsables de la marque française se montrent également ravis: «Le fait d’avoir pu amener un pilote suisse dans un engagement officiel Renault, c’est un point dont nous sommes très fiers», souligne le sporting manager Tarik Ait Said. «On compte d’ailleurs sur le soutien des Suisses!»

Mais chaque année possède sa propre histoire. Il en ira vraisemblablement autrement en 2017 pour Renault et Michael Burri. «C’est à chaque fois différent», relève le Prévôtois, qui ne pense pour le moment qu’à demain.

«Il faut profiter au maximum et peut-être pouvoir se faire repérer par une autre écurie. Mais disons que l’objectif est déjà plus que réussi. Je voulais être un jour professionnel.»

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