Une décision précoce pour éviter la faillite

Christian Kobi

Lundi 16 mars 2020. Les Courses de Bienne doivent avoir lieu dans près de trois mois, du 4 au 6 juin, mais les organisateurs prononcent déjà ce jour-là l’annulation de leur manifestation en raison de la pandémie de coronavirus. Trop tôt, se disent certains, qui pensent que le vent aura tourné d’ici-là. Pourtant, aujourd’hui, personne n’oserait remettre en question le bien-fondé de cette décision. «Si on avait attendu plus longtemps, cela aurait pu nous coûter très cher», affirme Fränk Hofer, directeur d’une épreuve qui devait vivre sa 62e édition cette année.

Le responsable biennois n’y va pas par quatre chemins: en agissant aussi promptement, le comité d’organisation a selon lui évité une faillite à l’Association des Courses de Bienne, qui chapeaute l’événement avec ses mythiques 100Km. Rien que ça. «Les trois derniers mois avant la manifestation représentent la phase la plus coûteuse, notamment en termes d’infrastructures et de gastronomie. Là, nous avons pu stopper la machine juste à temps et limiter quelque peu la casse», estime Fränk Hofer.

T-shirts sauvés de justesse
Une question de jours, de minutes peut-être. A titre d’exemple, près de 5000 t-shirts destinés à être offerts aux participants étaient prêts à partir à l’imprimerie avec, sur le bon à tirer, les dates de 2020. Si la commande n’a pas pu être annulée, il a néanmoins été possible de modifier les dates «à la der» pour y faire figurer celles de… 2021, du 10 au 12 juin en l’occurrence. «Cela nous a évité de devoir jeter 5000 t-shirts à la poubelle», souffle le directeur. Un gaspillage qui aurait représenté une perte de 50 000 francs!

Mais la situation financière n’en reste pas moins critique, car l’Association des Courses de Bienne ne roule pas sur l’or. Elle peut compter sur des réserves de 70 000 fr., dont on comprend bien qu’elles pourraient rapidement être épuisées. «Rien que le montant des frais d’inscriptions déjà encaissés pour 2020 représente 100 000 fr. Si nous devions offrir un remboursement ou un transfert sur l’année prochaine à tout le monde aujourd’hui, nous serions à cours de liquidités», répète Fränk Hofer.

Alors les organisateurs sont à la recherche de solutions. En tout, ce sont près de 300 000 fr. qu’ils doivent dénicher pour boucler les comptes 2019/20 ailleurs que dans le rouge. Pour y parvenir, ils escomptent notamment sur la générosité de leurs sponsors. «Nous prenons contact avec chacun d’entre eux. Les premiers retours sont positifs», respire le directeur. La Ville de Bienne, par exemple, a décidé d’allouer le même montant que les années précédentes aux organisateurs (30 000 fr.), quand bien même aucun coureur ne se lancera dans la trépidante aventure de la «Nuit des nuits» cet été.

Des nouvelles en fin d’été
Une demande d’aide financière a également été adressée à la Confédération, qui avait annoncé fin mars qu’elle allait allouer 50 millions de fr. au sport populaire sous la forme de contributions à fonds perdu. «Nous pensons répondre à tous les critères pour toucher cette aide», déclare Fränk Hofer, qui précise que celle-ci serait «d’une grande importance» pour la survie des Courses de Bienne. «Ce n’est qu’une fois que nous saurons quel montant nous toucherons que nous pourrons boucler nos comptes et communiquer aux participants si nous pouvons rembourser, et le cas échéant dans quelle proportion, les frais d’inscriptions pour cette année», détaille-t-il. Des nouvelles sont attendues d’ici juillet-août.

Car mine de rien, 2021 pointe déjà le bout de son nez. «Nous avons l’intention d’ouvrir les inscriptions pour l’année prochaine dès le mois d’octobre», se projette Fränk Hofer. Les t-shirts offerts aux futurs participants attendent, eux, déjà sagement au placard. Avec les dates du 10 au 12 juin 2021 imprimées dessus. Ouf!

Pas d’alternative cette année, mais une probable nouvelle course en 2021
La question s’est bien sûr posée après l’annulation de l’édition 2020: faut-il proposer une alternative à l’automne, lorsque la pandémie de coronavirus ne sera, possiblement, plus qu’un mauvais souvenir? Et la réponse n’a pas tardé. «Une édition des Courses de Bienne, c’est une année entière de préparation effectuée par un comité de  65personnes», indique Fränk Hofer, le directeur général. «De ce fait, changer la date n’entrait tout simplement pas en ligne de compte, ni même la mise sur pied d’une ‹petite› course en octobre par exemple. Cela demanderait tout simplement trop de travail et empiéterait sur les préparatifs de l’édition 2021.»

Assez logiquement, le comité d’organisation a donc décidé de concentrer toutes ses forces sur le bouclage des comptes de l’exercice 2019/20 ainsi que sur la préparation de la 62e édition, désormais programmée du 10 au 12 juin 2021. Une édition qui verra probablement la palette de l’offre à disposition des coureurs (100 Km, 56 km, 21,1km, 13,5 km, Kids Run) s’élargir. «Nous planchons sur une nouvelle course de courte distance, probablement de 5 km», confirme Fränk Hofer, qui précise que la demande pour ce type de distance est de plus en plus élevée. Le parcours reste encore à définir, mais l’idée serait notamment d’y intégrer la vieille ville.

Le départ, lui, serait donné tardivement, après celui des 100 Km (22h) et des estafettes (23h), ce qui aurait l’avantage d’animer une nuit biennoise trop courte aux yeux des organisateurs, qui voient les coureurs rapidement s’éparpiller sur les routes du Seeland. Sur la place de l’Esplanade, un vide nocturne serait ainsi comblé.

Fini les gobelets à usage unique
Autre nouveauté prévue pour la 62e édition, une mesure qui aurait déjà dû entrer en vigueur cette année, la disparition des gobelets en carton aux stands de ravitaillement. Désormais, les coureurs seront priés de prendre avec eux leur propre contenant, qu’ils pourront remplir tout au long du parcours. «Nous avons eu beaucoup de réactions positives à ce sujet. Cela nous permet de faire un pas supplémentaire vers un événement que l’on souhaite le plus durable possible», commente Fränk Hofer. Une nouveauté à découvrir dès le 10 juin 2021. Allez, plus que quelques nuits....