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Tribunal régional

Prévenu aux allures de mâle alpha

Sept plaignants pour un seul prévenu de tentative de meurtre, de vol de la bourse d’une serveuse, en passant par des coups, des blessures et quelques belles entourloupes

C’est sur l’étroite route des Gorges de Douane que le prévenu a commis ce qui pourrait être qualifié de tentative de meurtre en cherchant à précipiter la voiture de son rival dans le ravin. Ulrich Knuchel

Blaise Droz

Mettez sur le tapis de votre salon un chaton et une pelote de laine, laissez agir pendant une quinzaine de minutes et vous obtiendrez un parfait résumé de l’affaire qui occupe en ce moment le Tribunal de Moutier.

La justice aime regrouper les affaires lorsque cela est possible. Du coup, des plaignants vaudois ont dû se déplacer à Moutier pour expliquer comment un quinquagénaire du Jura bernois, de nationalité suisse, a volé le porte-monnaie de la serveuse dans un pub de Payerne et pourquoi il est accusé d’avoir subtilisé la recette d’un autre établissement de la même ville.

Des forfaits relativement modestes en comparaison des autres chefs d’accusation que devra décortiquer le Tribunal du Jura bernois-Seeland. Présidé par Jean-Mario Gfeller, le tribunal de 5 juges n’aura pas la tâche facile, pas plus que le procureur Raphaël Arn et l’avocat d’une plaignante, Me Michel Lauper, de Berne et celui du prévenu, Me Pascal Labbé, de Bienne. Dans cette affaire six plaignants sur sept se passent d’avocat, ce qui ne simplifie pas les choses.

Quelques faits marquants

Décortiquer ce dossier par le menu dans ces colonnes serait mission impossible. On se bornera à relater quelques éléments marquants.

Le fait le plus grave, celui de tentative de meurtre, éventuellement tentative de lésions corporelles graves est complété par des accusations d’infractions graves à la circulation routière. C’est sur la route des Gorges de Douane que le prévenu aurait pris en chasse avec son puissant 4X4 de passé 1,8 tonne une petite voiture de tourisme de 880 kilos.

Par des manœuvres criminelles, il aurait tenté de sortir la petite voiture de la route et de la faire dévaler une pente forestière en la heurtant par l’arrière puis en la poussant latéralement. Pourquoi? Comme dit l’adage, cherchez la femme. Et par conséquent la terrible rivalité entre les deux conducteurs impliqués.

De manière très étonnante, le plaignant ne l’est plus vraiment et il se présente devant le tribunal un rien contre son gré et sans avocat. Germanophone imperméable à la langue de Molière, il ne cherchait plus depuis longtemps à traduire les courriers qu’il recevait en relation avec cette affaire. Pas même les rapports d’expertise qui risquent de nuancer un peu sa version des faits. «Mon seul souhait est de ne plus jamais entendre parler de mon agresseur», dit-il.

David agresse Goliath

Mais le prévenu conteste la manière dont les choses ont été présentées par sa présumée victime. Selon sa version, c’est le poids plume David qui aurait bousculé Goliath.

«Quand il faisait mine de me dépasser, je sentais des pressions exercées contre ma carrosserie»,  assure le conducteur du 4x4 qui reconnaît tout de même avoir commis des erreurs ce soir-là.

«J’étais énervé, j’avais appris qu’il a exercé des contraintes sexuelles contre Madame X», à savoir précisément celle dont les deux hommes ont été tour à tour les compagnons. Sur ce dossier de violence routière, seule la confrontation des protagonistes avec le rapport d’expertise devrait éclairer la lanterne de ceux qui n’ont pas eu accès au volumineux dossier de cette affaire.

Or, si l’accusateur est nonchalant, le prévenu a tous les attributs du mâle alpha. Surveillant chaque fait et geste de son avocat, il entend aussi tenir tête au Tribunal et au Ministère public. Parfois en haussant le ton.

Impliqué dans les milieux équestres, il prend soin de chevaux, il en vend de même que parfois il fait commerce de vans. Ses activités lui valent une foule d’autres accusations, par exemple de maltraitance envers un cheval qui serait mort par manque de soins alors qu’il en avait la charge.

L’une des plaignantes l’accuse de coups sévères sur elle-même, autant que d’abus de confiance, voire d’escroquerie en relation avec la vente d’un poney qu’elle avait confiée au prévenu mais dont elle n’a jamais reçu le montant qui lui était dû. «Pourquoi je ne lui ai pas donné son argent?

C’est parce que les flics me l’ont piqué!», explique celui qui a déjà connu prison et séquestration de biens pour d’autres affaires et qui séjourne actuellement préventivement dans les geôles prévôtoises. Les témoins seront entendus aujourd’hui.

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