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No Billag

Quand les cinémas disent clairement non à No Billag

L’exploitant de la majorité des salles de l’Arc jurassien projette un spot opposé à la suppression de la redevance radio/TV. Une entorse à son refus habituel de diffuser des publicités politiques.

Les exploitants de salles sont nombreux à avoir accepté de projeter des spots contre l’initiative No Billag avant les films. Photo:François Allanou
  • Dossier

par Luc-Olivier Erard

No Billag, l’initiative qui vise à supprimer la redevance radio et télévision, est combattue jusque dans les salles obscures.

Considérant que priver les chaînes publiques de redevance mettrait en danger le cinéma suisse, la majorité des exploitants de salles romands ont choisi de sortir de leur réserve habituelle en matière de publicité politique.

C’est le cas d’Edna Epelbaum. Propriétaire et directrice de Cinepel et Cinevital, elle explique: «Il faut être très clair: si No Billag passe, c’en est fini des films suisses. «Ma vie de courgette», «L’ordre divin»... Ces grandes productions sont financées par la télévision. C’est d’ailleurs aussi souvent le cas de plus petites œuvres. Nous voulons poursuivre une programmation diversifiée, c’est pourquoi il est indispensable que le soutien au cinéma suisse se poursuive».

Pas de changement de pratique
La campagne contre No Billag est une exception et le restera, indique Edna Epelbaum: «Les salles de cinéma sont un terrain neutre, un endroit idéal pour la publicité et qui entend le rester. Il n’est pas question qu’elles deviennent le théâtre de la guerre entre partis.»

Ce n’est donc pas demain, en principe, que les partis pourront placer leurs poulains en format seize-neuvième avant le prochain James Bond.

Les partis pas ravis
Les partis ne voient pas cette initiative d’un très bon œil. Et malgré une campagne très virulente de toute part, la ligne de fracture ne recouvre pas celle de l’initiative.

L’UDC est en faveur de l’initiative. Les spots de Cinepel n’enchantent donc pas Niels Rosselet-Christ, président de la section cantonale du parti. «S’agissant d’une entreprise privée, on ne peut pas lui dicter sa conduite. Mais je trouve le procédé peu cohérent et disproportionné dans la mesure où ils ne sont pas directement concernés», dit-il.

Au PS, opposé à No Billag, Yann Hulmann, coordinateur politique, s’étonne aussi de voir des spots de campagne alors même que les partis ne peuvent pas en diffuser. «Une entreprise privée fait ce qu’elle veut en la matière, mais si elle s’est donné une règle, pourquoi ne pas la suivre cette fois-ci?»

Même son de cloche à peu de chose près au PLR: le privé fait ce qu’il veut, cependant si les cinémas n’acceptent jamais de politique d’habitude, pourquoi le faire dans ce cas? Ils devraient faire preuve d’un peu de retenue» réclame Nicolas Ruedin, président.

Une retenue que Nicolas Jutzet, responsable de la campagne en faveur de No Billag en Suisse romande, verrait lui aussi d’un bon œil: «Cinepel s’adonne à un drôle de mélange des genres. Il ne faut pas oublier que les cinémas ont touché des aides publiques, notamment pour passer au digital.»

Le jeune PLR neuchâtelois estime aussi que l’affaire «démontre que la redevance mêle des intérêts très divers», un motif de plus, selon lui, pour se passer de redevance.

 

Le cinéma suisse dans les salles
- 4,51%: Part de marché du cinéma suisse, qui a réalisé 619656 entrées sur un total de 13,734 millions d’entrées en 2016.

- 5,28%: Part de marché moyenne du cinéma suisse sur les sept dernières années. La meilleure année fut 2013, avec 6,38% des entrées, notamment grâce à la sortie de «Achtung, Fertig, WK», qui s’était hissé au 13e rang du box-office.

- 101024: Nombre d’entrées de «Ma vie de courgette», premier film suisse à figurer au box-office pour 2016, à la trentième place.

- 68: Le nombre de premières sorties de film suisse en 2016.

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