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Faits d’hiver (3)

Saut dans le passé

Vallonnée, mais peu pourvue en longues pentes, la région a néanmoins accueilli toute sorte de compétitions. Principalement jurassiennes.

Fritz Tschannen, l’Imérien volant, a notamment battu le record du monde de saut en 1948. Photo:Ski-Club Mont-Soleil

par Dan Steiner

Comme l’écrit Pierre-Henri Bonvin dans l’édito de la plaquette réalisée, en 2009, pour les 100ans du Giron jurassien des clubs de ski, résumer une si longue histoire fait fi de l’exhaustivité. Cet épisode fait également sienne cette «excuse», sinon ce vœu d’humilité, en mettant en lumière seuls quelques événements qui ont marqué un siècle de ski dans le Jura bernois. En gros depuis la fondation du Giron ou du Ski-Club Saint-Imier, en 1903. Au final, pas mal de concours régionaux, mais peu de niveau national.

 

Saut à skis, une épreuve phare oubliée
Lucien Bühler n’en fait pas une obsession, mais on sent que ne pas retrouver tous les tremplins de la région le chiffonnerait quelque peu. En tout cas ceux dont une trace subsiste, qu’elle soit physique ou topographique. Car pour ceux qui l’ignoreraient, on en dénombrait une quinzaine sur le territoire du Giron jurassien des clubs de ski, dans les années50. Président en 2009 lors de la sortie de la plaquette des 100ans de l’association, le Tramelot connaît évidemment bien ceux de son village, le tremplin des (T)Charrats et celui des Combattes (lire aussi l’épisode d’une précédente série d’hiver du JdJ, le 9janvier 2015). «Pourquoi le saut à ski était si populaire, dans la région? Eh bien parce quec’était un sport spectaculaire.» Moins couru toutefois dès le milieu du 20e siècle, il ne se pratiquait ainsi quasi plus qu’à LaChaux-de-Fonds ou au Locle ensuite. «Aux Charrats, j’ai sauté du petit tremplin. Le grand, je n’ai jamais osé. D’ailleurs, je n’avais pas l’équipement pour et il fallait déjà se lancer suffisamment pour passer la bosse», sourit Lucien Bühler.
Mais comme on a sauté du coq à l’âne, revenons aux tremplins du Jura bernois... Notre homme est en effet tombé – pas par hasard – sur celui de Malleray. Il connaissait bien sûr aussi celui de Mont-Soleil et va se mettre à la recherche de celui qui aurait existé à Villeret, selon un ami. Il y en avait aussi à Perrefitte, à Graitery ou aux Prés-d’Orvin. Bon, mais quand on évoque la pratique du saut dans l’Arc jurassien, impossible de ne pas citer son plus célèbre représentant, Fritz Tschannen, disparu au-delà des cimes en 2011. C’est que, à 8ans, en 1928, l’Imérien d’origine donnait déjà son tout premier... concert d’accordéon en solo, mais franchissait également 36m à Mont-Soleil. Puis il y fixera, à jamais, le record à 49m. Sa passion pour le saut à ski, qui s’était déclarée à ses 5ans déjà, le propulsera au plus haut de la hiérarchie mondiale. En 1948, il devient en effet champion de Suisse, se classe 9e du concours olympique de Saint-Moritz, mais réalise surtout la meilleure performance mondiale de tous les temps à cette époque: un bond à 120m, effectué à Planica, en Yougoslavie (Slovénie). Le tout sans casque ni lunettes et dans le style caractéristique de l’époque (voir photo). Pas un saut dans l’inconnu, donc, mais presque.

 

Ski Alpin, seulement régional
A l’instar du saut à ski, l’alpin n’a pas à proprement parler connu les joies de grandes compétitions dans notre région. Entendez par là l’organisation de championnats de Suisse élites. Bien que vallonné, le Jura bernois reste couvert de forêts et les pentes, si elles sont raides, ne sont pas forcément longues. Les championnats jurassiens ou OJ étaient suffisants, tout comme des rencontres intercantonales. Sous l’impulsion d’un certain Jean-Jacques Wiesmann, par exemple, le Ski-Club Moutier (SCM) a bien organisé le slalom géant de l’Oberdörferberg, ou Oberdörfli, dès 1942. Une course qui, selon la plaquette du 50eanniversaire du SCM (1978), «eut, dès le début, la réputation d’être le plus important slalom du Jura et, rapidement, il attira chez nous les meilleurs skieurs du pays». Mais le pionnier des compétitions a bien sûr été le SCSaint-Imier, fondé en 1903 et qui organisait, le 23février1908, le premier grand concours régional, qui réunissait alors les trois disciplines: vitesse, fond et saut.

 

Ski de fond TramELan, La Mecque en 1978
Et puis vient le fond, l’une des trois disciplines phares du ski, qui, associé au saut, en produit une quatrième: le combiné nordique. Voilà pour le décor. Mais la pratique du fond dans la région a donné lieu à LA grande épreuve de ski du 20esiècle jurassien bernois: les championnats de Suisse de Tramelan, en 1978. Du 28janvier au 5février, le village allait devenir La Mecque helvétique de la discipline, une grande fête voulue pour le 800edu village. «Mais on avait quelques craintes, car nous avions eu un Noël sans neige», se remémore Lucien Bühler. Alors député socialiste au Grand Conseil, le Tramelot donne de précieux coups de main, mais renonce à faire partie intégrante de l’organisation de l’événement, au programme duquel on retrouve le 15km, le 30km et le 4x10km relais messieurs, le 5km, le 10km et le 3x5km relais dames; le 15km et le 4x10km messieurs juniors, ainsi qu’un championnat pour les écoliers et les...  journalistes. «Et puis, tout à coup, la neige est venue! Les écoles nous ont prêté main-forte pour amener de la neige à des endroits où le parcours en était dépourvu. Et, durant la semaine de la course, nous avons eu toutes sortes de temps...»
Selon l’ancien enseignant, les coureuses et coureurs ont eu pour terrain de jeu un «très joli parcours, difficile mais varié». A relever aussi que l’épreuve faisait office de dernière compétition avant l’annonce des sélections suisses pour les Mondiaux de Lahti, en Finlande. Dans LeJdJ du 1erfévrier1978, on note que «les félicitations fusent pratiquement de toutes parts, et à tous les niveaux. Cette sympathique avalanche de compliments émane aussi bien des personnalités de la Fédération suisse de ski que d’officiers militaires richement galonnés ou d’hommes politiques.» Pour ce qui est des résultats, le Zurichois Bruno Heinzer avait fait main basse sur le 15km, le Valaisan Edi Hauser sur le 30km et la Suédoise naturalisée Görel Bieri sur le 10km dames.
Outre les épreuves tramelotes, l’on se doit aussi de rappeler le véritable marathon que le Club alpin académique de Bâle a organisé chez nous en 1934, 1935 et 1938. Soit une course de 50km passant par le Stallberg, l’Oberdörferberg, le Raimeux, la Montagne de Moutier et le Moron. Le tout sans remplacement de matériel autorisé. Titanesque.

 


Peu de monde autour de la piste pour les championnats de Suisse de fond disputés à Tramelan, en 1978?Heureusement non, puisque cette photo a été prise en marge de la compétition, qui fut un succès. Photo:Ski-CLub Tramelan
 

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