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Moutier

Un postulat quasi unanime

Suivant la moitié de la Députation, le Grand Conseil ne veut brader aucun des bâtiments étatiques sis en Prévôté. Encore faut-il voir à qui il est judicieux de les vendre.

Entre le bâtiment de la police, du Ministère public (ici, à droite), du Tribunal régional Jura bernois-Seeland ou encore la prison, Berne possède à la rue du Château un patrimoine estimé à 26,3 millions de francs. Archives Dan Steiner

Par Dan Steiner

A ce stade des négociations du transfert de Moutier dans le Jura, l’acceptation de cette intervention déposée par huit membres de la Députation francophone ne fera pas osciller d’un iota les deux cantons concernés. Il s’agissait surtout de donner un signal. Une question de symboles et une démonstration de fermeté, rien de plus. Mais au moment où d’aucuns appellent à l’apaisement, d’autres clament que «le combat continue». Du côté de la couronne prévôtoise, on sait ce que cela veut dire.

«C’est dommage d’être retombés dans le piège du débat sur la Question jurassienne...» a toutefois soupiré Christoph Grupp, bien campé dans son rôle d’arbitre, en tant que Vert et Biennois. «Il est logique que l’on veuille vendre ces bâtiments à bon prix, mais, avec cette intervention, on envoie simplement une flèche, en quelque sorte.»

Pas de «parachute doré»

Cette intervention, c’est la motion déposée début juin par la moitié de la Députation francophone au sujet du patrimoine cantonal à Moutier. Au titre tout à fait évocateur: «pas de parc immobilier cédé au rabais par le canton de Berne», point d’exclamation. «Moutier partira seul et la Question jurassienne est terminée», a encore martelé Virginie Heyer, maire de Perrefitte, députée PLR mais surtout porte-parole de la motion. Qu’elle a accepté de transformer en postulat à la demande du Conseil exécutif. Pour elle, pas question de céder le moindre centime inutilement. «Et un parachute doré, tant qu’on y est?!»

En deux mots, les députées et députés jurassiens bernois demandaient surtout que l’Ours n’appose sa griffe en bas du concordat qu’une fois qu’une entente sur «la reprise de chaque actif cantonal situé dans la commune concernée» soit entérinée. Précision: «à au moins sa valeur comptable».

Dans sa réponse, le Gouvernement avait répondu qu’il devait pouvoir bénéficier d’une certaine marge de manœuvre, ce que lui laissait l’acceptation d’un postulat. «Il va de soi pour le Conseil exécutif qu’il s’efforcera de défendre au mieux les intérêts du canton.» Or, ne jugeait-il pas inutile de préciser, ni le droit suisse ni le bernois «ne renferment de disposition régissant la succession d’Etats entre les cantons». Le Jura a-t-il des droits sur le patrimoine (actif et passif) bernois? Dans le cadre du partage des biens, on navigue à vue, en somme.

Plus péremptoire fut par exemple Roland Benoit. Pour l’élu agrarien de Corgémont, le patrimoine bernois a été imaginé pour servir la population du district de Moutier et du Jura bernois au moment de sa construction. «Il n’appartient donc pas à la Ville de Moutier!»

Avant un vote envoyé avec 134 oui contre 4 non, seule Maurane Riesen (PSA, La Neuveville) avait pris ses responsabilités et plaidé pour le refus d’une motion «inutile et revancharde». «Mais Maurane», lui a alors lancé le Sieur vert’libéral Brönnimann, «il n’est que question de la jouer fair-play. Dans un divorce, on regarde bien la fortune de chacun avant de la séparer. Nul besoin de s’exalter pareillement.»

Des valeurs théoriques

Certains groupes n’ont d’ailleurs pas caché que leurs ouailles auraient été tout à fait disposées à accepter l’intervention sous la forme de la motion. Mais le Canton a également prévenu, «il faut noter que le transfert de tous les biens immobiliers cantonaux au Jura n’est pas forcément la meilleure solution pour Berne. Il ne faut donc pas exclure d’emblée d’autres options, comme la vente de certains biens-fonds à des privés.»

Pour Christoph Grupp, fixer des conditions trop contraignantes n’aurait rien apporté. Une position éminemment politique, selon Virginie Heyer. Enfin, quant à la valeur ses bâtiments sis en Prévôté, communément évalué, selon l’Assurance immobilière, à quelque 48,7 millions, l’Ours rappelle que ces chiffres sont «des valeurs théoriques de reconstruction aux prix actuels».

Pour le conseiller d’Etat Pierre Alain Schnegg, il s’agit évidemment de boucler l’affaire le plus rapidement. «Mais Berne n’est pas seul pour fixer le tempo, et il a dû attendre d’avoir quelqu’un en face, à la table des négociations.»

 

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