Vous êtes ici

Abo

Saignelégier

Gloire aux jardiniers de l’ombre

Les merveilleux vers de terre en fil rouge pour le Marché bio

Produits bio, techniques vertes, conférences et artisanat, de quoi satisfaire toutes les curiosités et les envies des visiteurs. Photos Stéphane Gerber

Claire-Lise Droz

«C’est formidable, ce qu’on pouvait faire avec ces vers de terre. En un mois, ils mangeaient une paire de vieux jeans, on ne retrouvait que la fermeture éclair!» Parole d’un ancien éleveur de vers de terre toujours aussi passionné, Olivier Luder, l’un des conducteurs des CJ. Il assistait parmi un public captivé à la conférence de Claire Le Bayon sur «Les vers de terre», samedi après-midi au Marché bio et artisanal de Saignelégier.

Cette 28e édition s’inscrivait dans le cadre de l’année 2015 internationale des sols. Donc, le thème du ver de terre, fil rouge de ce marché, était tout trouvé, comme architecte des sols fertiles, jardinier de l’ombre, «les intestins de la terre» comme le qualifiait Aristote.
«C’est un temps idéal pour parler du ver de terre!» lançait Claire Le Bayon, car samedi le temps était pluvieux. Et ce merveilleux ver de terre aime l’humidité.

Il fut en butte à maintes rumeurs malveillantes après les temps antiques, jusqu’à ce que Darwin le rétablisse dans ses lettres de noblesse. Aussi utile qu’inoffensif, il n’a quasiment aucun moyen de défense contre ses nombreux prédateurs, dont la taupe qui en raffole. Pourtant, le ver est à l’origine de la fertilité et de la stabilité des sols. Ses déjections «sont des puits d’éléments nutritifs. Ce sont des animaux essentiels pour nous, pour notre santé». Comment le protéger? Eviter le labour intensif, la monoculture...

Photo ©: Stéphane Gerber

Pluie effrayante

Claire Le Bayon communiquait sa ferveur à son public, avide de renseignements. On a appris par exemple que les vers de terre sont terrifiés par les vibrations des gouttes de pluie qui leur évoquent les vibrations faites par les taupes. Donc, ils s’enfuient et c’est pour cela qu’on les voit grouiller sur les routes après une pluie d’orage, «et puis ils sèchent sur place et ils meurent! Si vous pouvez les attraper et les mettre dans le jardin d’à côté, ce serait pas mal...»

Les manger? Pourquoi pas. Personnellement, Claire Le Bayon n’a encore pas essayé, mais «c’est une excellente source de protéines» et certaines peuplades amérindiennes ou papous en mangent encore.

Olivier Luder n’en a pas encore mangé lui non plus, mais n’y verrait pas d’inconvénients. Il avait entamé la culture des vers dans les années 1980, à l’usage des vivariums, pêcheurs, jardiniers, et même de la doctoresse Kousmine «qui m’en avait pris pour son jardin». Son rêve, c’est de créer des composts de quartiers, d’en retirer des vers de temps en temps, de les laver, de les réduire en poudre et d’en faire un aliment genre soupe «pour ceux qui ont faim dans le monde».  «Comme apport protéiné, c’est incroyable. Ce serait un filon à explorer», répondait Claire Le Bayon.

Après la conférence, Olivier Luder s’interrogeait. «Cela montre qu’il faut en prendre soin, de ces vers», ce qui n’est pas le cas de l’agriculture actuelle. Or, «déjà dans les années 1980, quand j’élevais des vers de terre, il y avait des pays en Asie qui ne savaient plus quoi faire pour regagner des sols fertiles...»

«Une très bonne édition»

Photo ©: Stéphane Gerber

Pour ce Marché bio, les exposants ont fait assaut d’imagination, avec 104 exposants et 25 artisans. Hier en fin d’après-midi, la présidente du comité d’organisation Lina Dubied était enchantée. La météo a été grincheuse samedi, mais hier, «c’était bourré à craquer». On estime la fréquentation à quelque 26 000 personnes, davantage que l’an dernier, et le thème du sol a conquis le public. «C’était une très bonne édition!»

Articles correspondant: Région »