"L'école de demain, elle est ici"

Matthieu Hofmann

«Demain... L’école.» C’est le thème qui a été choisi pour la 17e Journée des enseignants francophones, organisée par le Syndicat des enseignants du Jura bernois (SEJB), qui se tenait hier à la salle de la Marelle à Tramelan. «Quel beau thème pour une journée syndicale», s’est réjoui le directeur de l’instruction publique (DIP) du canton de Berne Bernhard Pulver. «L’école de demain elle est ici, devant moi», a glissé le conseiller d’Etat en s’adressant aux enseignants.

«Une relation humaine»
Au programme, notamment à travers divers ateliers, l’intégration des élèves au sein de l’école ainsi que l’arrivée des technologies dans le monde de l’enseignement. Les perspectives dans le domaine scolaire ont également été évoquées. «Enseigner, c’est un métier de l’humain», a mis en avant Bernhard Pulver. «Ce n’est pas un processus industriel ou un quelconque service public.» Et d’ajouter: «L’éducation est avant tout une relation humaine, entre les enseignants et les élèves.» Des propos que son secrétaire général suppléant, Aldo Dalla Piazza, a poursuivi l’après-midi lors de la table ronde mise sur pied. «Bernhard Pulver veut une école construite à partir de la base, à partir de vous», a-t-il glissé, toujours à l’adresse de l’auditoire. Parlant de son expérience personnelle, celui qui était le directeur du gymnase français de Bienne a assuré que le don à l’autre était indispensable dans la fonction d’enseignant. «Il faut s’approcher de ces élèves qu’on essaie de découvrir: Qui est-il? Que devient-il? Qui sera-t-il?»

Impossible sans créer
Valérie Rytz, enseignante spécialisée à Saint-Imier, toujours lors de la même table ronde, a, elle, souhaité mettre en avant la créativité nécessaire à chaque enseignant. «Chaque enfant est tellement différent, chaque enfant a des besoins particuliers. Sans créativité, c’est impossible d’y répondre», a-t-elle lâché.
Pierre-François Coen, Dr en sciences de l’éducation et professeur spécialisé à la HEP Fribourg, a lui insisté sur la difficulté du métier d’enseignant, avec un trait d’humour: «Apprendre à lire est infiniment plus complexe qu’une opération à cœur ouvert, où il ne s’agit que de tuyaux. Je simplifie peut-être un peu.»

Et la collaboration?
On a aussi parlé collaboration et entraide entre enseignants. «Il y a de très gros efforts et de très gros progrès qui ont été faits», a félicité Georges Pasquier, ancien président du Syndicat des enseignants romands. «Mais actuellement encore, les institutions ne sont pas organisées pour. Il faut se battre contre le système pour faire de la collaboration.» Pour Guy Lévy, ancien secrétaire de la DIP, «la collaboration n’est pas la solution à tous nos problèmes.» Peter Gasser, coprésident du SEJB, a évoqué la collaboration comme quelque chose de «génial et difficile». Et de poursuivre: «Il ne faut pas mésestimer l’épuisement de nos collègues. Pouvoir se téléphoner à 23h entre enseignants, c’est bien. Mais c’est encore mieux de pouvoir dormir.» Enfin, Andréa Fuchs, collaboratrice scientifique à la DIP, a glissé que la collaboration prend du temps à mettre en place. «Surtout au début», a-t-elle poursuivi. «C’est un projet à long terme.»

Venir en aide aux enfants en difficulté
L’association des professionnels de l’Enfance en difficulté (APED) fête cette année son 20e anniversaire. L’occasion pour Francine Wälchli-Vouillot, sa directrice de profiter de cette 17e Journée des enseignants francophones du canton de Berne pour parler de cette organisation. Forte d’une soixantaine de membres, l’APED se compose aussi bien d’enseignants que d’éducateurs, de psychologues, de psychomotriciens, d’orthophonistes, de médecins ou encore de parents. «Elle s’adresse à toutes les personnes soucieuses du sort des enfants en difficulté scolaire ou familiale», a précisé cette enseignante spécialisée à la retraite.
Les buts de l’APED sont multiples: promouvoir aussi bien l’éducation et l’enseignement des enfants en difficulté que la prise en charge thérapeutique, ou encore l’organisation du perfectionnement des professionnels concernés. «Il s’agit également d’entretenir des relations avec les autorités ainsi qu’avec d’autres associations poursuivant les mêmes buts», ajoute Francine Wälchli-Vouillot. Chaque année, des cours de formation continue sont mis sur pied par l’association, des cours qui sont gratuits pour les membres. D’ailleurs, hier, au terme de la journée, 15 personnes désireuses de rejoindre l’APED s’étaient manifestées. A noter que l’organisation est née des cendres de la section Jura-Jura bernois, l’Association suisse d’aide au handicap mentale, disparue en 1997.   mho

Trois questions à Andréa Fuchs, collaboratrice scientifique à la DIP
Que peuvent ou doivent, selon vous, apporter les nouveaux enseignants, ceux qui sortent de la HEP?
Beaucoup! Si l’expérience donne évidemment des clefs, les nouveaux enseignants en ont d’autres, notamment celles qui permettent de maîtriser les changements du métier et de la société. Ils ont certainement un autre regard sur le monde. Il faut qu’ils se donnent le droit de prendre la parole et d’apporter ce qu’ils ont à apporter.
Quelle place faut-il donner à la créativité dans l’enseignement?
La créativité est la base de l’enseignement. Chaque enseignant doit pouvoir amener ses propres ressources, ses idées.
Vous évoquez la possibilité que les enseignants doivent rendre des comptes, comment imaginez-vous cela?
Il s’agissait surtout de titiller les enseignants présents. Loin de moi l’idée de les surveiller ou de les fliquer. Mais c’est le seul corps de métier où on ne doit pas compter ses heures. Attention, je ne parle pas de timbrage, simplement de rendre des comptes. Cela serait une manière de faire connaître et reconnaître ce métier. Ils auraient ainsi l’occasion de démontrer la quantité de leur travail.  mho