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Moutier

Un homme qui ne peut être franc

Le Tribunal n’a que peu goûté aux digressions systématiques du principal prévenu, accusé notamment d’infractions à la loi sur les stupéfiants.

Les deux prévenus ont été condamné pour infraction grave à la loi sur les stupéfiants. Pexels
Par Sébastien Goetschmann
 
«Pour que le jury soit convaincu d’une preuve, la crédibilité des intervenants joue un rôle important», a rappelé, en préambule, la présidente du Tribunal régional Jura bernois-Seeland, Maryvonne Pic Jeandupeux. Or le principal prévenu, qui comparaît depuis la semaine dernière pour diverses infractions (Le JdJ des 8 et 9 février), n’a cessé de mentir et digresser. «Dans un questionnaire à choix multiple, vous cocheriez toutes les cases y compris celle indiquant autre proposition», a-t-elle lancé en relevant les divergences observées entre ses différentes dépositions et les faits.
 
Pour rappel, les deux hommes, dont le verdict est tombé hier, étaient notamment accusés d’avoir tenté de lancer une exploitation de cannabis dans une ancienne usine de Moutier. Quelque 2000 plants, qui devaient être livrés dans la cité prévôtoise, avaient été interceptés à la douane germano-suisse, en mars 2019. Au final, le quarantenaire domicilié dans le Jura bernois a écopé de 24 mois d’emprisonnement avec un sursis de quatreans, d’une peine pécuniaire de 160 jours-amendes à 100 fr. avec le même sursis, ainsi que d’une amende de 10 200 fr. Le second prévenu, habitant la région bâloise, il a pris 18 mois avec un sursis de trois ans et 115 jours-amendes à 70 fr. dont 90 avec sursis. De nationalité étrangère, il sera également expulsé du territoire suisse pour une durée de cinq ans.
 
 
Agressif et imbu
Mais revenons-en à ce qui a motivé la décision du Tribunal collégial à trois juges, qui a dépeint le principal accusé comme quelqu’un de fier, imbu de lui-même et qui ne parvient pas à reconnaître ses torts. «Vous répétez à qui veut bien l’entendre n’avoir jamais rien fait d’illégal, alors que vous n’avez cessé de violer la loi», a assené Maryvonne Pic Jeandupeux.
 
La présidente a notamment relevé que Januz* n’a jamais obtenu d’autorisation de la Préfecture pour exploiter un club ni même demandé d’autorisation pour dépassement d’horaire dans son bar. «Cela explique la fréquence des contrôles de police dans l’établissement», a-t-elle ajouté. La juge a également souligné le caractère agressif du prévenu envers les forces de l’ordre ainsi que son manque de respect, un terme qu’il a souvent galvaudé durant ses dépositions.
 
Au vu du comportement général de cet ancien patron de bar, qui est aussi interdit d’exercer cette profession pour les cinq prochaines années, le jury n’a pu qu’être sceptique quant à son innocence clamée haut et fort. Comme pour cette plantation d’au moins 320plants de cannabis, exploitée entre septembre et novembre 2017, dans un local loué par des complices et dont l’électricité a été détournée de l’établissement tenu par Januz.
 
«Il est assez clair que vous étiez en affaire avec la famille qui a géré l’exploitation, vous aviez d’ailleurs signé un bail pour ouvrir ensemble une usine de fenêtres», a relaté la juge. «Les nombreux échanges téléphoniques attestent également que vous étiez proches. C’est en vous rendant compte qu’ils avaient pris la poudre d’escampette que vous avez finalement porté plainte en mai 2018, alors que la facture d’électricité de votre local avait déjà explosé des mois avant. Ne sachant pas si vous avez touché une quelconque somme d’argent de ce trafic, il faut considérer, in dubio pro reo, que vous vous êtes fait pigeonner.»
 
 
Activités illégales
Januz a aussi été reconnu coupable d’avoir mis à disposition des machines à sous et d’avoir procuré du travail illégal à des filles de Balkans, employées pour effectuer des tâches de service ou de nettoyage, comme chanteuses, danseuses, ou même personnes de contact. L’homme a eu beau se justifier en affirmant qu’il s’agissait d’amies donnant parfois un coup de main, l’argument n’a pas convaincu. «Dans l’appartement avec huit lits que vous louiez pour héberger ces musiciennes, il n’y a jamais eu beaucoup d’instruments de musique», a ironisé la présidente. Le prévenu ayant désormais une situation stable et n’ayant plus fait de vagues, le Tribunal a toutefois été clément dans son calcul de la peine.
 
Quant au second larron, il devait être au courant que l’exploitation n’était pas légale. Sinon il aurait demandé un business plan et des chiffres à transmettre à son investisseur dont il a toujours tu le nom, de peur de représailles.
 
*Nom d’emprunt

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