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Courses de Bienne

Florian Vieux versus Michaël Boch

Les deux derniers vainqueurs des 100 Km face à face ce soir dès 22h

C'est parti pour les Courses de Bienne!

Laurent Kleisl

 

De Doha à la nuit seelandaise

Demain à l’aube, la Nuit des Nuits aura choisi son favori. Elle doit trancher, la friponne. Entre Florian Vieux et Michaël Boch, entre le vainqueur 2013 (7h14) et celui de 2014 (7h20). Car le Chablaisien de 29 ans et l’Alsacien de 34 ans s’affronteront enfin sur les 100 Km de Bienne.

L’étrange discipline de l’hectokilomètre a déjà produit un duel, à distance, entre les deux hommes. Le 21 novembre dernier, Vieux et Boch ont défendu l’honneur de leur patrie respective aux Mondiaux de 100 km à Doha. Vingt-deuxième en 7h13, le Français a dompté le Suisse, 34e en 7h31 (91 athlètes classés). «J’étais bien pendant 65 km, puis j’ai serré...», admet Vieux. Boch, également, a souffert sur le bitume de la capitale qatarienne: «Le jour de la course, je n’étais pas super bien, je suis un peu passé à travers. Devant, il y avait un gros niveau.» Il a fallu 6h27 à l’Américain Max King pour être couronné roi de la planète savate.

Contrairement au pittoresque tracé des 100 Km, celui proposé aux forçats de la route à Doha n’avait rien de poétique. Une boucle de 5 km à parcourir à 20reprises, «ce n’était pas très passionnant», avoue Vieux. «Au début, c’est difficile», enchaîne Boch. «Après, quand on est dans la course, ça passe. Tourner en rond, c’est surtout dur psychologiquement.» Le tout, dans la tiédeur moite de l’automne qatarien, pour des préliminaires instructifs. C’est que du 21 novembre au 18 décembre 2022, le petit émirat accueillera la Coupe du monde de football. «C’était tout à fait supportable, mais il faisait chaud. Par chance, le taux d’humidité n’était pas très élevé», indique Boch.

Florian Vieux Vainqueur des 100 KM de Bienne en 2013

Au-delà du tracé et des considérations météorologiques, c’est le décor qui a frappé les deux derniers amants de la Nuit des Nuits. «Courir au cœur de Doha, c’était hallucinant», lance Vieux. «Les Qataris ont des infrastructures exceptionnelles, et il y en a pour tous les sports. Ils ont même une salle couverte climatisée pour la pratique du football. Et dire que là-bas, la meilleure équipe doit être du calibre d’une 3e ligue de chez nous.» Pas de quoi inquiéter le FC Sion en finale de la Coupe de Suisse. «Comme personne d’autre, d’ailleurs!», se marre le Valaisan. «Il y a tellement d’installations sportives que cela en est un peu ‹too much›», coupe Boch. «Disons que ce n’est pas vraiment dans l’esprit d’une course de 100 km.»

Choquant et indécent

Un esprit de travail solitaire, de souffrance intime. Loin du tape à l’œil, de l’ego économique. «Quand on voit le niveau de vie des Qataris, tout l’argent qu’ils ont, c’est de la folie», souffle Vieux. «Mais derrière, beaucoup de gens n’ont pas grand-chose. On ne nous a montré que les beaux côtés du pays.» Boch acquiesce: «Tout cet argent, c’est choquant, indécent, surtout quand de nombreux travailleurs sont exploités. Je n’étais jamais allé au Qatar. Ce fut une belle aventure, mais je n’y retournerais pas pour mes vacances!»

 

Des préparations opposées

Les chemins de Florian Vieux et Michaël Boch se croiseront pour la première fois aux 100Km de Bienne. En guise de préparation, les deux galériens de la route ont suivi des trajectoires diamétralement opposées.

Entre janvier et début avril, le Valaisan a vécu trois mois au Kenya, au nirvana des coureurs de fond. Pour la sueur, bien sûr. Pour l’expérience de vie, également. «J’étais à Iten, où tous les grands champions se préparent», raconte Vieux. «Je m’entraînais deux fois par jour à la kenyane. Ça marque le corps et l’esprit! Ces trois mois ont été très éprouvants.»

Impatience et plaisir

A son retour, le Fribourgeois David Girardet, vainqueur des 100 Km de Bienne en 2010 et 2012, lui a concocté un programme spécifique. «Pour me retaper, il m’a formellement interdit de participer à des courses avant les 100 Km de Bienne», sourit le polymécanicien. «Du coup, j’attends vendredi soir avec impatience!» Cette année, une seule épreuve d’envergure figure à l’actif du Chablaisien, le Marathon de Rotterdam, qu’il a bouclé à la 69e position. Soit 15 rangs derrière... Girardet!

Boch, lui, a foncé. Une victoire le 25 avril aux 100 km de Belvès (Périgord) en 7h07, une troisième place – «Seulement...» – aux championnats de France de la spécialité le 17mai en Vendée en 6h59 et, entre deux, une participation aux «Wings of life», le 3mai à Olten. «La formule est particulière. On court jusqu’à ce qu’on se fasse rattraper par la voiture-balai», note-t-il. Premier du volet suisse, l’Alsacien a pris la 12eplace planétaire, avec 70,14km, de cette épreuve caritative multisite contribuant à la recherche sur la moelle épinière.

Michaël Boch Vainqueur des 100 KM de Bienne en 2014

Vieux et Boch, leurs vues sur les 100 Km, aussi, divergent. «Pour moi, c’est l’objectif de ma première moitié de saison», annonce Vieux. «Je me suis bien entraîné, je suis prêt! Je vise la victoire et un temps sous les sept heures.» Il relativise son propos: «Bon, avec des gars comme Michaël Boch et Michael Kaufmann (réd: 2e en 2014), il y a une sacrée concurrence!»

Boch, justement, n’avait pas inscrit les 100 Km de Bienne à son agenda dans un premier temps, «car j’ai déjà beaucoup couru», dit-il. «Puis j’ai décidé de me faire plaisir en participant aux courses qui me font plaisir. Je sais, j’ai un titre à défendre, mais je ne m’en préoccupe pas. Une épreuve de 100 km, c’est toujours une aventure, surtout à Bienne, dans cette ambiance nocturne si particulière. Je n’ai suivi aucune préparation spécifique. Par contre, j’ai de l’énergie à revendre!»

Puis, la voix serrée, il rappelle le décès du journaliste français Christophe Rochotte, dimanche dernier à l’âge de 53 ans. «Je l’ai encore eu au téléphone samedi soir. En France, il était la mémoire du fond. Je vais penser à lui, c’est un peu une course hommage...»

 

Une erreur temporelle s’est glissée dans notre article d’hier. C’est bien en 1996 que le Zurichois Peter Camenzind a signé son record sur les 100 Km de Bienne (6h37), et non en 1999 comme faussement indiqué.

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